Auteur de nombreux livres :
Le voyage du pèlerin,
La cité de l'âme,
La prière,
Histoire de la pèlerine
John Bunyan naquit en 1628 à Elstow, petit village situé à une demi-heure de Bedford, en Angleterre.
Ses parents étaient de pauvres gens ; son père, Thomas Bunyan, était rétameur de casseroles ; sa mère, Marguerite Bentley, était originaire d’Elstow.
John avait plusieurs frères à qui leur père fit apprendre un métier, mais c’est tout ce que l’on sait d’eux.
En revanche, la vie de John Bunyan est très connue, car lui-même nous a raconté d’une manière saisissante son évolution, qui rappelle un peu celle de saint Augustin arrivant à la vie chrétienne.
C’est dans sa biographie, qu’il a écrite lui-même, que nous trouvons ce qui suit.
Ses parents l’envoyèrent à l’école à Bedford, afin qu’il apprît à lire et à écrire, et que plus tard il pût, tout en ayant une bonne éducation, succéder à son père dans son métier.
Il dut bientôt l’aider dans son travail.
Mais il se laissa entraîner à toutes sortes de fautes et d’actions répréhensibles, et lui-même déclare qu’il devint bien vite le chef des enfants du village pour les jurements, les mensonges, la maraude et la contrebande, toutes choses qui attirèrent des punitions officielles.
C’est par d’étranges chemins, et après bien des combats et des luttes spirituelles, qu’il devait arriver à être un serviteur de Dieu ferme et convaincu.
Il eut une activité bénie, par sa parole et par ses écrits qui se lisent encore de nos jours.
Il raconte que déjà à l’âge de dix ans, sa conscience lui reprochait ses fautes, et que les sentiments religieux ne se sont jamais complètement éteints en lui.
La pensée des tourments de l’enfer l’inquiétait jour et nuit jusque dans ses rêves, mais bientôt la fougue de la jeunesse dissipa ses inquiétudes.
De salutaires expériences le conduisirent plus loin.
Deux fois, il faillit se noyer : une fois dans la rivière de Bedford, l’autre dans la mer.
La témérité de sa jeunesse le poussa un jour à attraper une vipère : Il lui ouvrit la gueule avec un bâton, et lui arracha avec la main ses crochets à venin, sans se blesser.
En l’année 1642, il s’engagea, comme soldat, dans l’armée du Parlement contre Charles 1er, et il était au service lors du siège de Leicester.
Il devait être placé en sentinelle, mais un camarade insista pour avoir ce poste, et fut tué d’une balle.
Ainsi la vie de Bunyan fut de nouveau préservée, mais la miséricorde de Dieu, qui semblait si clairement démontrée, le laissait encore froid.
Dieu l’appela alors d’une autre manière.
Lorsqu’il eut quitté l’armée, à 20 ans, il se maria sur le conseil de ses amis qui espéraient que ce changement apporterait de la modération dans sa vie.
Sa femme était une orpheline, si pauvre, qu’elle n’apporta dans le ménage qu’une soupière, une cuillère et deux livres qu’elle avait reçus en héritage de son père, qui était puritain.
L’un avait pour titre : La pratique de la piété, et l’autre : Le chemin de l’homme droit vers le ciel.
Tous deux lurent souvent ces livres qui étaient leur délassement après le travail.
La femme parlait souvent de son père, homme craignant Dieu, et de la vie pieuse qu’il avait menée.
Ces conversations finirent peu à peu par influencer Bunyan.
A partir de ce moment, il revint, officiellement tout au moins, au service de Dieu, allant à l’Eglise deux fois chaque dimanche.
C’est alors que commença le combat entre l’esprit et la chair qui devait aboutir au triomphe de l’esprit.
Une prédication de Christophe Hall sur le mauvais emploi du dimanche lui fit une profonde impression, car le prédicateur attaqua ses divertissements préférés.
Une lutte intérieure commença : Elle dura plusieurs heures, mais le soir venu, Bunyan se retrouva à la table de jeu.
Toutefois, à peine eut-il commencé à jouer, que la lutte recommença.
Etouffant la voix de sa conscience, il s’obstina dans son péché, et se livra même à toute la grossièreté de la vie du bas peuple.
Puis, au bout d’un mois, tandis qu’il jurait près de la fenêtre d’un voisin, il fut repris par une femme qui, bien qu’elle eût une mauvaise réputation, lui reprocha les jurements qu’elle venait d’entendre, lui disant qu’il pouvait pervertir ainsi toute la jeunesse de la ville.
Ces reproches, partant de si bas, pénétrèrent profondément dans son cœur.
A partir de ce moment, il prit la résolution de ne plus jurer, et triompha de ce vice. C’est alors qu’il fit la connaissance d’un ami chrétien, homme pauvre, qui le rendit attentif aux Saintes Ecritures et au service de Dieu.
Une révolution s’opéra en lui.
Il lut la Bible et sa conduite s’améliora de plus en plus.
A la vérité, il n’avait pas encore trouvé la grâce qui lui permit de se consacrer au seul service du Christ ; mais déjà ses voisins s’étonnaient de sa conversion et de sa vie morale.
Après une année de combat, il renonça même à la danse.
Cependant il était encore rempli de propre justice.
C’est alors qu’il vint à Bedford, à propos d’un travail, relatif à son métier de rétameur de casseroles, que voulaient lui confier trois femmes pieuses converties par les prédications du baptiste John Gifford.
Il les trouva assises devant leur porte, s’entretenant de choses divines ; mais ce qu’elles disaient était tout à fait nouveau pour Bunyan.
Elles le rendirent attentif à la résurrection, à la misère de ceux qui comptent sur leurs propres forces et non sur la magnificence de la grâce du Christ.
Ceci l’attira, et il s’absorba dans ces pensées.
Peu à peu, il comprit pourquoi ces femmes étaient si joyeuses, et il lut de nouveau les Saintes Ecritures avec de tout autres yeux.
Maintenant, il se plaisait à lire les épîtres, alors que précédemment il préférait les livres historiques.
Il fit la connaissance de Gifford lui-même.
Le langage humble, et cependant plein de force, de repentir et de grâce du prédicateur, l’attira et l’enthousiasma pour le Seigneur.
Une prédication sur le Cantique des Cantiques (4 : 1) : " Que tu est belle, mon amie, que tu es belle ! " l’ébranla puissamment.
John Gifford avait été converti après une vie de désordre ; personne n’était donc mieux qualifié pour conseiller Bunyan.
A la vérité, il fut de nouveau inquiété par des sectaires dont les interprétations étaient sensuelles.
Ces sectaires, nommés " Ranters ", prêchaient les joies de la chair, mais ils ne purent le détourner du chemin de la grâce.
En 1653, il vint s’installer à Bedford, mais il connut les luttes spirituelles pendant deux ans encore.
Plus il pénétrait dans la connaissance de la grâce, plus ses souillures lui paraissaient grandes.
Il crut avoir commis le péché contre le Saint-Esprit.
Après de nombreuses expériences corporelles et spirituelles, il entra enfin dans la vraie vie.
C’est alors qu’il écrivit :
" Maintenant les entraves ont été vraiment détachées de mes pieds ; j’ai été délivré de mes tristesses, de mes chaînes ; mes tentations disparaissent, de sorte que ces terribles passages bibliques :
Marc 3 : 28 et 29 ; Hébreux 12 : 16 et 17 ne m’angoissent plus, et je m’en vais joyeux vers ma demeure, en me réjouissant de la grâce et de l’amour de Dieu ! "
Enfin, par la grâce de Dieu, il avait surmonté son désespoir et trouvé la base ferme du salut, c'est-à-dire Jésus-Christ.
C’est alors, en 1655, qu’âgé de 27 ans, il se rattacha comme membre actif à l’Eglise baptiste.
Il fut baptisé une seconde fois et il communia.
Il demeurait dans sa chaumière à Elstowe.
Le Seigneur lui avait donné deux enfants : Marie, sa fille aveugle, qu’il aimait tendrement, née en 1650, et Elisabeth, née en 1654.
En même temps que la paix entrait dans son âme, sa position s’améliora.
Jusqu’alors on l’avait considéré comme un bohémien, désormais il fut estimé de ses concitoyens.
C’est encore en 1655 qu’il alla s’établir à Bedford comme prédicateur baptiste.
Appelé parfois à prendre la parole après une prédication, il le fit très modestement ; ce fait se renouvela toujours plus fréquemment, puis, avec sept autres, il fut enfin nommé prédicateur pour un culte régulier et public.
C’est ainsi qu’il put mettre au service d’autrui la vie nouvelle qui lui avait été communiquée par le Saint-Esprit.
Il continua cependant son métier de rétameur de casseroles, et s’en alla, de village en village, travaillant et prêchant.
C’est par centaines que les gens venaient l’entendre.
Dans les forêts, dans les granges, dans les prairies, parfois aussi dans les Eglises, partout il dressait sa chaire.
Combien grande était la puissance de ses prédications, c’est ce que montrera l’exemple que nous allons citer.
Sous le gouvernement de Cromwell, les Baptistes, qui étaient considérés comme dissidents par le haut clergé anglais, avaient le droit de se servir des Eglises officielles.
Un jour, Bunyan devait prêcher dans une Eglise de village, près de Cambridge.
Une grande foule d’auditeurs était rassemblée au cimetière.
Un étudiant, passant à cheval, demanda ce qui arrivait.
On lui répondit que ces gens s’apprêtaient à entendre prêcher un certain Bunyan, rétameur de casseroles.
Cela l’intrigua ; il descendit de cheval, donna six kreutzer à un gamin pour qu’il lui gardât sa monture, et déclara qu’il voulait entendre prêcher ce rétameur de casseroles, parce que ce devait être bien amusant !
Mais la Parole de Dieu qui sortit de la bouche du rétameur fit une si grande impression sur le jeune homme, que désormais il saisit toutes les occasions d’entendre Bunyan, et que plus tard, sous Olivier et Richard Cromwell, il devint lui-même un prédicateur vivant.
En 1658, il n’y avait aucun danger pour John Bunyan à prêcher comme prédicateur baptiste, quoique la jalousie et l’envie des ecclésiastiques lui donnassent bien du tracas.
Son premier livre : Eclaircissements sur quelques vérités évangéliques, lui amena de longues discussions avec la secte des Quakers.
C’est alors – en 1660 – que Charles II fut rétabli sur le trône de ses pères.
A la vérité, il avait, de Breda en Hollande, où il vivait en exil, publié une proclamation dans laquelle il promettait d’accorder pleine liberté de culte aux consciences faibles et délicates.
Personne ne devait être inquiété au sujet de ses opinions, si celles-ci s’écartaient du culte officiel, pourvu qu’elles ne troublassent pas la paix du royaume.
Mais à peine fut-il monté sur le trône, qu’il oublia toutes ses promesses.
Les anciennes peines contre les dissidents eurent de nouveau force de loi, et furent même aggravées.
C’est ainsi que les Baptistes, et Bunyan lui-même, ne purent pratiquer leur culte qu’en secret.
Ce dernier dut une fois, afin de ne pas être découvert, se déguiser en cocher, le fouet à la main, pour aller tenir ses réunions dans une grange écartée.
Au commencement d’octobre, ordre avait été donné que la liturgie de l’Eglise anglicane fut lue dans le culte public.
Bunyan ne s’inquiéta pas de cet ordre qu’il considérait comme ne le concernant pas, et il ne changea rien à ses prédications.
Il fut alors dénoncé, par un traître, comme ennemi du gouvernement.
Le 12 novembre 1660, il devait prêcher à Samsell, dans le Bedfordshire, sur ce texte,
Jean 9 : 25 : " Crois-tu au Fils de Dieu ? "
Le juge Wingate l’ayant appris, ordonna en cachette d’amener devant lui le prédicateur insoumis.
Les amis de Bunyan le prièrent de ne pas se rendre dans ce village, mais voulant rassurer par un acte l’Assemblée anxieuse, et fortifié lui-même par la prière, il se rendit à l’endroit où il devait prêcher.
A peine avait-il lu le texte, qu’il fut arrêté par un constable.
Sur sa demande, on lui permit d’adresser quelques mots d’adieu à l’Assemblée, puis il fut emmené en prison.
Pendant l’enquête, il fut accusé d’avoir fréquenté l’Eglise d’une manière diabolique et nuisible, d’être un fauteur d’Assemblées et de réunions illégales.
Bunyan concéda qu’il avait tenu des Assemblées, mais il refusa de jurer qu’il ne prêcherait plus.
Le juge lui dit alors : " Tu es condamné à rentrer dans ta prison et à y rester trois mois ; ensuite si tu refuses de fréquenter le service de l’Eglise établie, tu seras banni du pays. Si tu y rentres, sans une permission particulière, tu seras condamné à être pendu. "
Bunyan répondit : " Je n’ai rien à ajouter, car si je sortais aujourd’hui de prison, demain je prêcherais de nouveau l’Evangile, avec le secours de Dieu. "
Pourtant, on n’exécuta pas la seconde partie de la condamnation.
Bunyan s’était déjà accoutumé à l’idée d’être mis à mort ; il avait préparé le sermon qu’il voulait adresser aux spectateurs de son exécution ; mais les choses ne furent pas poussées jusque-là ; l’exil même, lui fut épargné.
On le retint d’autant plus sévèrement, au commencement du moins, dans les cachots de Bedford.
Aucune tentative, ni même l’amnistie promulguée par Charles II, en avril 1661, ne purent le faire libérer.
La prison était un lieu terrible pour Bunyan ; dans son " Voyage du Pèlerin ", il la nomme
" l’enfer. "
Il était, du reste, enfermé avec beaucoup d’autres.
A un certain moment ils furent 60, tous condamnés pour des motifs religieux.
Bunyan profita de cette occasion pour tenir des prédications et pour prier avec ses codétenus.
Le plus dur pour lui, fut de se séparer de sa seconde femme et de ses quatre enfants.
Sa première femme était morte après une pénible maladie, avant son emprisonnement.
Pour entretenir sa famille, il travailla dans sa prison ; il faisait des travaux au crochet, des rubans et des cordons.
Il obtint la permission de faire vendre ces ouvrages, devant la porte de la prison, par sa fille aveugle.
Pendant les premiers temps, sa détention fut très sévère ; plus tard, un portier la lui adoucit.
Il lui permit de prêcher parfois dans les villages et dans les bois d’alentours.
Beaucoup de Baptistes durent leur réveil religieux à ses prédications nocturnes.
En 1666, il fut libéré et s’en alla à Londres.
Mais au moment où il parlait dans une Assemblée, il fut de nouveau arrêté, emprisonné et traité bien plus sévèrement que la première fois.
Comme on avait entendu parler des licences qui lui avaient été accordées par son portier, on le surveilla plus attentivement.
Un employé fut envoyé de Londres à Bedford, pour faire une enquête, afin de savoir si véritablement on lui avait accordé plus de liberté qu’on n’en avait le droit.
Cet employé avait reçu l’ordre de visiter la prison, au milieu de la nuit, sans prévenir personne.
Or cette nuit-là, précisément, Bunyan avait eu la permission d’aller dans sa famille ; mais ne pouvant pas dormir, il était retourné à la prison.
Le portier avait été très irrité de ce dérangement tardif.
Peu après apparut l’employé de Londres, demandant si tous les prisonniers étaient présents.
" Oui, " lui fut-il répondu.
" John Bunyan est-il là ? "
" Certainement ".
" Je désire le voir. "
Bunyan fut appelé, et l’employé s’en alla tranquillisé.
Le portier dit ensuite à Bunyan : " Tu peux sortir quand cela te plaira, tu sais mieux que moi-même quand tu dois revenir ! "
Bunyan resta en prison jusqu’en 1672.
Dans le silence du cachot, il commença, dès les premiers temps de son emprisonnement (1660 – 1665) à écrire ses 60 livres d’édification les plus renommés.
Dernièrement, la critique a établi que c’est pendant son second emprisonnement qu’il posa les bases de son Voyage du Pèlerin, dont la première partie ne parut qu’en 1678.
Pour son premier ouvrage, il n’employa pas d’autres documents que la Bible et le Livre des Martyrs de Fox.
Ainsi qu’il le raconte lui-même, il en lut tout d’abord les premiers fragments à ses compagnons de captivité et leur demanda leur opinion.
En octobre 1671, lorsqu’il était encore en prison, il fut choisi comme prédicateur des Baptistes à Bedford, mais ce ne fut qu’en 1672, le 17 mai, qu’il entra en charge.
Il dut sa libération, sous Jacques II, à des gens influents de Bedford, qui intervinrent en sa faveur.
Désormais, il commença à prêcher avec toute sa puissance, sans abri, dans des granges, au milieu des vergers.
A côté de cela, il s’occupait de l’âme de ses semblables, tenait des réunions de prières, et écrivait des livres d’édification.
Un peu après sa libération, il réussit à obtenir que dans le comté de Bedford et dans les comtés voisins, les Baptistes pussent librement tenir des Assemblées.
A la suite de cette autorisation, 25 prédicateurs furent nommés, et lui-même obtint 31 salles de prières.
Bunyan fut le chef spirituel des Baptistes de son pays, ce qui lui valut le surnom d’évêque Bunyan.
Mais il continua à gagner son pain quotidien, en partie tout au moins, en raccommodant les chaudrons.
Il continua à demeurer dans une humble maison, semblable à celle d’un ouvrier.
Sa chambre d’étude était à peine plus grande que la cellule de sa prison.
Un hangar, derrière la maison, lui servait d’atelier.
Pour sa vie intérieure, il recourait toujours aux Saintes Ecritures, aux œuvres des Pères, à celles de Luther, dont il préférait la traduction de l’épître aux Galates.
Sa réputation croissait de jour en jour.
Chaque année, il faisait une tournée de prédications et se rendait une fois à Londres.
Dans cette ville, la chapelle ne pouvait contenir la moitié des gens qui désiraient l’entendre.
On raconte qu’une fois, au milieu de l’hiver – c’était un jour ouvrable – plus de 1200 personnes étaient rassemblées pour l’entendre à 7 heures du matin.
Une autre fois 3000 personnes s’étaient réunies dans le même but.
Parmi ses auditeurs, on rencontrait des gens de toute culture et de toute condition.
John Owen, le fameux docteur en théologie, s’assit, lui aussi, aux pieds de Bunyan.
Charles II lui demanda une fois comment un homme aussi cultivé pouvait s’abaisser à écouter prêcher un rétameur de casseroles.
A quoi Owen répondit : " Majesté, je donnerais volontiers tout mon savoir pour posséder son éloquence ! "
Plusieurs fois, on tenta d’attirer Bunyan à Londres, mais il resta modestement fidèle à sa communauté.
Ni la perspective d’une activité plus étendue, ni la possibilité de gagner davantage, ne purent le déterminer à abandonner la communauté de Bedford.
Il eut encore à traverser bien des épreuves dans ces temps si troublés pour l’Angleterre, tant au point de vue religieux que politique.
On le jeta de nouveau en prison, probablement dans celle où il avait déjà passé douze années, mais sa détention ne dura que six mois.
Grâce à l’intervention du Dr Owen, le fameux chapelain de Cromwell, et de l’évêque Lincoln, il fut remis en liberté.
Pendant un certain temps, il fut chassé de Bedford ainsi que sa communauté.
Sous Jacques II, qui monta sur le trône en 1685, il dut souffrir de nouvelles persécutions.
Il y risqua souvent sa vie et souvent aussi, le peu qu’il possédait lui fut enlevé.
Ce n’est qu’en 1687, par l’Acte d’indulgence, que la liberté religieuse complète fut octroyée à l’Angleterre.
Mais Bunyan ne devait en jouir que peu de temps.
En 1688, il fut atteint d’une violente maladie.
Il se rétablit suffisamment pour pouvoir venir en aide à l’un de ses amis, dans des circonstances particulières.
Un jeune gentilhomme, son voisin, l’avait prié d’intervenir auprès de son père demeurant à Reading, qui était près de sa fin et voulait le déshériter.
Bunyan, quoiqu’encore convalescent, monta précipitamment à cheval et se rendit, de Londres, chez le père du jeune homme.
Il fut assez heureux pour le réconcilier avec son fils.
Ensuite, il retourna à cheval à Londres, éloigné de 37 milles anglais environ de Reading, mais en chemin il fut surpris par une forte pluie.
Il arriva tout mouillé dans la maison d’un ami, à Londres, et après avoir encore prêché le dimanche 19 août, il fut saisi le jeudi suivant d’une violente fièvre.
Il fut malade pendant dix jours, et le 31 août, il mourut à l’âge de 60 ans.
Ses dernières paroles furent : " Ne pleurez pas sur moi, mais sur vous-mêmes ; je vais auprès du Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui, bien que je sois un grand pécheur, me recevra grâce à l’intervention de son Fils bien-aimé. J’espère que nous nous reverrons là-haut pour chanter un cantique nouveau et pour être bienheureux pendant toute l’éternité. "
Son cadavre fut transporté au cimetière de Finsbury, au milieu d’une grande affluence.
C’est dans ce même cimetière que dorment Watt, Owen, Wesley.
Une simple pierre funéraire, avec sa statue couchée, orne son tombeau.
Bunyan est l’auteur de nombreux livres d’édification (60).
Son " Voyage du Pèlerin, de ce monde à celui qui doit venir, " acquit une renommée universelle.
La première partie parut en 1678 et atteignit bientôt deux éditions.
La troisième parut en 1679.
En 1685, Bunyan publia la deuxième partie de cet ouvrage.
Ce livre renferme une allégorie très vivante et pittoresque.
Il dépeint le chemin de la conversion d’un chrétien, à travers les victoires et les combats, jusqu’à ce qu’il atteigne la Sion céleste.
Si ce livre, bien qu’il soit l’œuvre d’un Baptiste, a atteint un pareil succès, cela tient à des raisons d’ordre intérieur et d’ordre extérieur.
Parmi les premières on constate ceci :
Le livre s’en tient simplement à la marche du chrétien à travers les combats, les luttes et la mort, jusqu’à son arrivée à la vie éternelle.
Malgré la description détaillée des combats sur le chemin de la sanctification, le fondement est bien le même que celui des enseignements de la grâce et de la régénération tels que les donne la foi évangélique.
On y trouve une puissance d’imagination extraordinaire, jointe à une poésie naïve et une profonde conception du poème populaire.
L’auteur raconte avec un sérieux qui ébranle, et avec une connaissance de l’âme humaine qui semble le résultat d’études approfondies, comment l’on devient, comment l’on est, et comment l’on reste un chrétien vivant.
Le livre étant écrit par un Baptiste, il va sans dire que les moyens de grâce, la parole et les sacrements sont sacrifiés à la glorification de la puissance de la grâce.
Cependant, Bunyan – et c’est ce qui donne de l’importance à son livre – se garde de faire la part trop grande aux théories préférées des Baptistes.
Ranke, un des premiers éditeurs du " Voyage du Pèlerin " au 19ème siècle, en résume ainsi le contenu :
" Comment l’homme est attiré vers Christ et trouve la paix dans la foi à la grande délivrance qui embrasse toute l’œuvre du Sauveur ;
" Comment il est préparé et armé pour les combats qui l’attendent, et instruit sur la manière dont il peut résister ;
" Comment, humilié de sa faiblesse, il est gardé du désespoir ;
" Comment, à mesure que de nouvelles tentations et de nouveaux mécomptes lui sont infligés, il rencontre toujours de nouveaux soulagements et raffermissements jusqu’à ce que son âme parvienne, dans la paix de Dieu et du Sauveur, à la vie éternelle.
" Voilà ce qui est dépeint dans ces images, si lumineuses et agréables, que le lecteur qui veut traverser, sans en être atteint, les dangers de ce monde, se sentira aussi bien encouragé à accepter ce que dit l’Evangile de notre béatitude en Christ, qu’à suivre fidèlement le Seigneur. "
Quant aux raisons extérieures de la renommée universelle du livre, elles résident dans la forme attrayante soit de l’image, soit des comparaisons qui y sont employées et qui s’accordent bien avec le langage populaire du texte primitif.
Ce langage simple et large qui sera conservé, autant que possible, dans cette traduction française, lui gagnera certainement de nouveaux lecteurs.
Le " Voyage du Pèlerin " est, après la Bible et " l’Imitation de Jésus-Christ, " de Thomas a Kempis, le livre le plus répandu dans le monde.
Que le Seigneur veuille se servir de la nouvelle traduction pour amener beaucoup d’âmes à la vérité, et les conduire à la foi en Christ et au bonheur d’une vie de communion continuelle avec Lui !