Bonheur de milliardaires

Le " roi du Pétrole " M. John Rockefeller qui, il n’y a pas si longtemps de cela, venait de s’installer en France, à Compiègne, au château des avenues – enfoui dans un vaste parc entouré de grands arbres, résidence d’ailleurs bien connue, située un peu à l’écart de la ville – est l’homme le plus riche du monde, le plus grand des milliardaires.

Physionomie tout-à-fait curieuse, que celle de cet homme, dont la situation extraordinaire fixe l’attention de tous ses semblables des deux hémisphères, et les étonne d’autant plus qu’il vit malade et solitaire comme un petit rentier.

Devenir riche !

Quel rêve, pour les trois quarts des humains.

Être riche ? Mais cela veut dire être heureux, pense la majorité des hommes.

Eh bien ! Ce nabab américain n’est point heureux.

Depuis de longues années, il souffre d’une maladie d’estomac réputée incurable, que, jusqu’à présent, les docteurs les plus renommés des deux continents n’ont pu arriver à guérir, pas même à atténuer.

S’il possède au plus haut degré le génie des affaires, c’est de son propre aveu, à la façon particulière dont il fut élevé par son père, à l’habitude qu’il lui donna de ne compter que sur lui-même, qu’il le doit.

A lui seul, il rapporte l’extraordinaire réussite de toutes ses entreprises.

" Mon père " dit-il lui-même dans un article qu’il écrivit une fois pour répondre aux nombreuses attaques dirigées contre les procédés qui lui ont acquis une fortune aussi colossale. " m’apprenait à faire tous les petits travaux que pouvait accomplir un enfant de mon âge.

" A sept ans, il m’apprit à traire une vache, tout comme un enfant de la campagne, et je m’en tirais aussi bien qu’un homme.

C’est là une bien petite affaire ; n’empêche que c’est par là, que j’ai commencé. "

Tel est le secret qui fit de lui l’homme le plus envié, du moins le plus riche du monde.

A huit ans, on lui confie un cheval, et voici les conseils que lui donne son père :

- Mon fils, prends garde en descendant la colline. Fais attention à ce qu’il ne fasse pas un faux pas. Mais quand tu seras en plaine, laisse-le trotter.

- Je n’ai jamais oublié ses paroles, ajoute le narrateur, et je ne les oublierai jamais.

Il n’avait pas encore onze ans, qu’on le chargeait déjà d’aller sur les coteaux voisins, acheter à la corde la provision de bois de la famille.

C’était du bon bois, du hêtre ou de l’érable qu’il choisissait toujours, et il n’avait besoin de personne pour se rendre compte des pieds cubes de bois qu’il y avait dans une corde, ni pour que son vendeur lui fit bonne mesure.

Lorsqu’il eut quelques années de plus, son père lui dit un jour :

- Voici de l’argent, mon fils, je veux que tu me fasses bâtir une bonne maison de briques, dont nous ferons notre demeure.

" J’eus aussitôt recours à un architecte, raconte-t-il ; nous passâmes un contrat et construisîmes la maison.

Comme je n’eus aucune difficulté, ni avec l’architecte, ni avec l’entrepreneur, cela me donna une énorme confiance en moi.

Pendant ce temps, pour gager un peu d’argent, je bêchais, plusieurs jours durant, les pommes de terre d’un fermier du voisinage ; j’avais alors treize à quatorze ans, et faisais ce travail avec un plaisir extrême, m’occupant du matin au soir. "

Il économisait rigoureusement toutes les petites sommes qu’il gagnait ; mais bientôt il s’aperçut qu’en prêtant deux cent cinquante francs pendant un an à cinq pour cent, taux légal aux Etats-Unis, il pouvait gagner autant d’argent qu’en bêchant des pommes de terre pendant dix jours.

Dès lors, dans son cerveau, s’ancra cette idée, qu’il valait mieux que l’argent fût son serviteur, que lui son esclave.

Principe dont il se souvint toujours.

Mr. Rockefeller a seize ans ; c’était en 1855 ; il passe trois mois dans une école commerciale, puis, le 26 septembre de la même année, après s’être cherché une situation, il entre dans une maison de commerce où il aide à tenir les livres.

Jusqu’au 1er janvier qui suit, il ne touche aucun salaire, mais peut lui importe ; " ce qu’il voulait ", dit-il lui-même, " c’était la situation, le travail m’intéressant et me plaisant à ce point, que si j’avais travaillé pour moi, je n’aurais pas pu mieux faire. "

" Comme je voudrais, " ajoute-t-il, " que tous les jeunes gens sachent que c’est le véritable moyen de conserver une situation. "

Jusqu’au 1er avril 1857, Mr. Rockefeller conserve la sienne ; puis l’occasion se présentant de s’associer avec un jeune homme, son aîné de dix ans, les 4.500 francs qu’il avait économisés et 5.000 francs que lui prête son père à 10% lui permettent d’entrer dans l’affaire, dont le capital était de 20.000 francs.

Tout alla bien, dès la première année.

Les bénéfices furent de 22.000 francs ; les deux jeunes gens s’en trouvèrent pleinement satisfaits, d’autant qu’outre cette somme, ils avaient l’un et l’autre gagné la confiance de leurs clients, mais encore des banquiers.

Cette confiance, ils l’acquirent grâce aux principes toujours mis en pratique dans toutes les affaires, de ne jamais payer de marchandises ayant qu’elles n’aient été livrées ou chargées sur les navires, c’est-à-dire, d’une part de ne pas faire de crédit, de ne pas spéculer de l’autre.

Ce principe sauva parfois les deux jeunes associés de terribles situations.

C’est ainsi qu’un incendie ayant détruit leur plus important entrepôt, Mr. Rockefeller trouva sans la moindre difficulté, auprès des banquiers, toutes les sommes dont il eut besoin.

- Quelle grande chose, quel souverain triomphe, de s’entendre dire par un homme qu’il croit en votre parole, qu’il a confiance en vous, remarque M. Rockefeller… Et quel bonheur, durant toute une carrière, de sentir que tous ceux avec lesquels vous êtes en relation, se reposent aveuglément sur vous !

S’adressant ensuite aux jeunes gens, l’homme le plus riche du monde leur donne ce conseil : ne vous découragez jamais.

Ne jetez jamais le manche après la cognée. Ne méprisez pas les plus modestes places.

Faîtes bien ce que vous faîtes ; mettez votre bonheur à toujours faire mieux.

Une vie heureuse est impossible sans l’application incessante au travail.

Ce fut, et cela est encore, tout le bonheur du pauvre homme.

Dans sa maison de New-York, où est venu s’installer, il y a une quinzaine d’années, après avoir quitté Chicago, sa ville natale, il lui arrive parfois – très rarement – de convier quelques amis à sa table.

Pendant qu’autour de lui on boit du champagne au rétablissement de sa santé, il sourit mélancoliquement, en buvant du lait, seule boisson que lui permettent les médecins et aussi son estomac.

Comme tous ceux qui souffrent, constamment, Mr. Rockefeller est triste.

A quoi lui sert son revenu annuel de cent vingt millions, ce qui fait dix millions par mois, et trois cent trente-trois francs trente-trois centimes à dépenser par jour ?

A un reporter qui, pendant son séjour à Compiègne, l’interrogeait et lui disait : " Vous devez être heureux ", il répondit :

- Sans doute, mais je sens aussi une grande lassitude. Par mon labeur et mon énergie, j’ai accumulé, pendant cinquante ans, des sommes formidables.

Mais ça été aux dépens de ma santé. Et puis, peut-être y a - t-il autre chose à faire dans la vie.

Si la mienne était à recommencer, je crois que je donnerais un autre sens à mon activité.

Douloureuse parole, bien propre à faire réfléchir ceux devant lesquels la vie s’étend encore comme une route blanche à parcourir afin qu’ils en fassent un usage qu’ils n’auront pas à regretter.

Cette mélancolie de Rockefeller rappelle la confession également triste d’un autre milliardaire, Vanderbilt :

" Une fortune d’un milliard est un fardeau trop lourd pour un seul homme. Ce poids m’écrase et me tue…. Je n’en recueille aucun plaisir, je n’en retire aucun bien.

En quoi suis-je plus heureux que mon voisin qui possède un demi-million ?

Il goûte mieux que moi les vraies jouissances de la vie.

Sa maison vaut la mienne, sa santé est meilleure, il vivra plus longtemps, et lui, du moins, peut se fier à ses amis. "

C’est une preuve de plus que les meilleurs choses d’ici-bas ne s’achètent point avec de l’or.

Tout américain qu’il est, Carnegie habite un château de Skido, dans le nord de l’Ecosse.

C’est de là maintenant qu’il déverse les témoignages de sa générosité sur la multitude des quémandeurs et des bonnes œuvres.

Jeune garçon, la pauvreté l’avait obligé à travailler dans une fabrique de coton où il faisait des bobines et gagnait quelques francs par semaine, ramassés sou par sou.

Puis ce furent des dollars gagnés comme télégraphiste.

Il se trouva enfin tout à fait riche, avec un salaire de 1500 francs par an.

Un peu plus tard, il s’associa pour l’achat d’une entreprise d’huile et, à partir de ce moment, l’argent commença à affluer et aujourd’hui c’est par l’huile, le fer, les chemins de fer et autres sources, que ses revenus forment une fortune qui dépasse, dit-on, trois fois le revenu du roi d’Angleterre.

L’intérêt seul équivaut à 5. 625 francs par minute.

Vraiment, si André Carnegie devait dépenser sa fortune pour son propre plaisir, il devrait vivre l’existence de dix Methuselas !

A propos de ses humbles débuts, il a l’habitude de dire : " Si vous voulez devenir riche, commencez par être pauvre. "

Comme pour tous les possesseurs de milliards, le spectateur superficiel n’a qu’une pensée : comme il doit être heureux !

Et cependant, de même que le roi du Pétrole, de même que William Vanderbilt, Mr Carnegie n’a pas du bonheur pour son argent, il n’a encore pu l’acheter.

C’est à un diplomate et journaliste, très connu, à M., T. P. O’Connor, qu’il faisait un jour ses confidences.

Et O’Connor les raconte ainsi dans son journal :

" Je me souviens que nous vînmes à la gare dans sa voiture attelée à quatre et je lui dis en route, combien j’enviais sa fortune.

Alors il me répondit :

- Je ne suis vraiment pas à envier. J’ai soixante ans et je ne puis rien digérer. Je vous donnerais joyeusement tous mes millions si vous pouviez me donner votre jeunesse et votre santé.

Et je n’oublierai jamais ce qu’il dit ensuite.

Nous avions parcouru quelques distances sans parler, lorsqu’il se retourna soudain vers moi et d’une voix basse, sur le ton d’une amertume et d’une profondeur de sentiments indescriptibles, il ajouta :

- Si je pouvais faire le marché de Faust, je le ferais. Je vendrais joyeusement tout ce que j’ai pour recommencer la vie.

Et je vis qu’il se tordait les mains. "

Etrange destinée que celle des deux hommes les plus riches du monde !

Tous deux déclarent qu’ils voudraient recommencer la vie et en feraient un autre usage.

O richesses, que vous êtes vaines !

Vous qui êtes dans la pauvre humanité, comme un levier pour toutes les iniquités, toutes les corruptions, toutes les injustices.

Et ceux qui vous ont acquises, au prix des joies les plus pures et les meilleures, vous jetteraient au premier venu s’il pouvait leur donner, avec sa pauvreté, la jeunesse et la force.

Poignante ironie des choses périssables, radieuse consolation des choses immortelles, ces choses que nul métal n’achètera jamais et ne saurait souiller !

Divine miséricorde du Dieu-Sauveur qui donne aux hommes, gratuitement, ce dont chaque âme humaine a besoin, qu’elle soit celle d’un milliardaire ou d’un portefaix : la joie, la paix, le salut ici-bas et la vie éternelle, dans l’Au-delà !

Une constatation très douloureuse résulte de l’étude de ces figures remarquables.

Nous ne pouvons pas recommencer la vie.

Rien de plus irréparable que le gaspillage de l’existence ou la poursuite d’un but inutile absorbe toutes les facultés.

Aussi, est-ce avec l’espoir que les jeunes qui liront ces lignes seront amenés à en faire le sujet de sérieuses réflexions que nous les leur offrons.

Oh ! la précieuse chose que le temps, que les minutes, les heures, les jours !

Oh ! les précieuses choses que la jeunesse, la santé, l’énergie, l’intelligence, le talent !

Pensons-y aujourd’hui ; il est encore temps de revenir en arrière pour débuter dans un autre sens.

Les années passent si vite et bientôt viendra l’heure où les riches et pauvres disent : " je voudrais recommencer la vie, mais chaque homme ne vit qu’une fois et la mienne a été inutile. "

Mme Lydie-Vincens-Pelet.

Hedgar Pluviannes

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