Introduction
La question est de savoir si l'on ne pourrait pas présenter cet Evangile avec plus de simplicité, de pureté et de liberté, ...s'il n'y aurait pas des " vaisseaux neufs “ dans lesquels on pourrait offrir le " vin vieux " de la vérité divine ?
Il ne s'agit donc pas de conformer l'Evangile " aux idées du temps ", non ce serait le trahir.
Il ne s'agit pas de vouloir produire des conversions forcées, à l'aide de timbales, de trompettes, d'un bruit infernal, de discours incendiaires, de surexcitations des sens, de contorsions, ou par quel qu’autre artifice spirituel.
Non, ce serait établir une loi nouvelle à la place de l'Evangile et remplacer l'ancien par un nouveau pharisaïsme.
Non, pas un iota ne doit être retranché de l'Evangile, mais aussi rien de ce qui est étranger à son essence ne doit y être ajouté.
Chapitre 1
Le besoin d'un réveil
Nous extrayons du " Christian Herald " ce message :
" Le plus grand besoin de l'Eglise aujourd'hui est celui d'un réveil spirituel."
“ Comment résoudrons-nous les questions doctrinales qui menacent de ruiner certaines dénominations ?
Un réveil le fera.
" Comment affronterons-nous le problème des ouvriers et de l'argent pour les missions ?
Un réveil le fera.
" Comment arrêterons-nous le tourbillon de mondanité dans lequel sont attirés nos jeunes gens ?
Un réveil le fera.
" Comment nous défendrons nous contre l'apostasie qui menace de détruire notre foi ?
Un réveil le fera.
" Comment ferons-nous des progrès dans nos efforts pour gagner des âmes à Christ ?
Un réveil le fera.
" Les réveils du passé se sont produits dans des conditions semblables à celles en face desquelles nous nous trouvons aujourd'hui : mondanité, relâchement moral, scepticisme et disputes doctrinales ont été les éléments constitutifs du sol dans lequel a poussé la plante du réveil.
" Si nous voulons le réveil nous avons 4 choses à faire :
1 - Prier,
2 - Nous détourner du péché,
3 - Donner au Saint Esprit la place qui lui revient dans le travail et dans l'adoration de l'Eglise,
4 - Exalter le Christ crucifié (2 Chroniques 7 : 14). ”
Chapitre 2
Aurions-nous peur d'un réveil ?
Il y a des personnes qui ont peur du Réveil. Avoir peur du Réveil, avoir peur de rencontrer Dieu quand il est temps encore de se jeter à ses pieds et de lui dire comme le lépreux :
" Seigneur, si tu le veux, tu peux me rendre pur. "
Quelle peur étrange !
Ah ! sans doute, je comprends qu'on ait peur de rencontrer Dieu quand on se trouvera face à face avec Lui au dernier jour, sans justification, sans pardon, sans réconciliation, n'ayant à Lui apporter que les souillures d'innombrables péchés et le remord d'innombrables appels entendus et oubliés.
Je comprends qu'à cette perspective notre âme et notre chair elle-même frémissent d'épouvante et que déjà monte par avance à nos lèvres la clameur des réprouvés : " Montagnes, tombez sur nous ; coteaux, couvrez-nous de la colère de l'Eternel ! ".
Or nous n’éviterons les terreurs de cette rencontre suprême que si nous avons accueilli avec joie l'occasion de rencontrer d'abord le Seigneur quand Il nous apporte les bénédictions de sa miséricorde et qu'Il est prêt à nous dire, comme à tous les pécheurs qui venaient à Lui dans les villes et les villages de la Judée et de la Galilée : " Mon fils, ma fille, tes péchés te sont pardonnés, va-t’en en paix ! "
Et pourtant, malgré cela, il y a des personnes qui ont peur du réveil. Et pourquoi ? Sans doute, elles ont peur des révélations du péché.
Oh ! non pas des révélations publiques de nos péchés, mais des révélations personnelles, individuelles, silencieuses. " Venez voir un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait," disait la Samaritaine aux habitants de Sychar.
Avouons-le, nous aimons peu rencontrer cet homme-là.
Tout ce que nous avons fait, tout ce qui est franchement mauvais et aussi tout ce que nous qualifions de " pas tout à fait mauvais ", nos actions louches, équivoques, nos paroles hypocrites, nos mesquineries, nos petites jalousies, nos pensées douteuses, nos compromis, tout, tout ce que nous avons pensé, tout ce que nous avons voulu (car la pensée et la volonté sont aussi des actes), tout cela il nous le dira, Il nous le rappellera, Celui qui parle dans les Réveils, c'est-à-dire l'Esprit de Christ, Christ lui-même.
Et il y a des gens qui trouvent ces révélations singulièrement importunes.
On a peur du Réveil, non seulement parce que dans ces moments tous nos péchés remontent brusquement à la surface de nos consciences, comme les cadavres des noyés qui à un moment donné remontent à la surface de l'eau, parce qu'ils nous apparaîtront vraiment alors comme des cadavres, c'est-à-dire comme quelque chose de hideux, quelque chose avec lequel nous ne pourrons plus vivre, quelque chose dont il faudra à tout prix nous débarrasser.
C'est en fait de ce que l'Ecriture appelle les délices du péché. C'est en fait de la convoitise des yeux, de la convoitise de la chair, de l'orgueil de la vie.
C'en est fait de tout ce catalogue de misères spirituelles que l'apôtre appelle brutalement les œuvres de la chair ; et la question qui se pose donc est celle-ci : " Si vous avez peur du Réveil, n'est-ce pas parce que vous aimez mieux les ténèbres que la lumière ?
N'est-ce pas parce que vos œuvres sont mauvaises ? "
Je comprends alors que dans un pareil état d'âme on ait peur du réveil :
- peur du réveil individuel, du réveil collectif, du réveil social,
- peur du réveil qui, comme pour l'homme endormi, ouvrirait nos yeux sur nous-mêmes, sur nos misères, nos péchés, nos transgressions !
- du réveil qui nous entraînerait vers l'aurore, et puis vers la pleine lumière du soleil de justice qui porte la santé dans ses rayons !
- peur du réveil qui nous ferait vivre la vie spirituelle, la vie sociale, et même, jusqu'à un certain point, la vie matérielle dans les conditions normales et voulues par le Dieu qui nous a créés, nous a rachetés, veut nous sanctifier par son esprit, et nous donner l'héritage des gloires de l'Eternité !
On a peur du réveil !
On murmure dans sa somnolence, comme le paresseux du livre des Proverbes :" Encore un peu de sommeil, encore un peu d'assoupissement ".
Encore un peu de tranquillité dans nos infidélités, dans nos habitudes anciennes, dans les liens que nous ne pouvons nous décider à rompre !
Pas aujourd'hui ; demain il sera temps encore !
Pas aujourd'hui ; demain nous accueillerons le réveil !
Le réveil n'est pas ainsi à notre disposition et à nos ordres.
J’emprunte une comparaison à un historien du Réveil du pays de Galles : " En présence d'un mouvement unique par son importance, dit-il, rappelons-nous l'histoire de celui qui ramassait des œufs sur le flanc d'un rocher abrupt dominant une côte marine.
Suspendu à une corde, il s'était fait descendre depuis le sommet jusqu'au niveau de la corniche où les oiseaux déposaient leurs œufs.
Le haut de la falaise s’avançait en surplombant du côté de la mer dont les vagues se brisaient deux cent pieds plus bas, et le chasseur ne put atteindre les œufs qu'en imprimant à la corde un énergique mouvement d'oscillation.
Mais il lâcha la corde en sautant sur le bord du rocher et se vit pendant quelques secondes en proie à d'affreuses angoisses, abandonné entre le ciel et l'eau et condamné à périr. Déjà la corde, se balançant comme un pendule, revenait après s'être éloignée une première fois. Il ne parvint pas à la saisir.
Elle s'éloigna de nouveau et il se rendit compte que chaque fois qu'elle reviendrait elle serait un peu plus loin de sa portée. Un seul moyen de salut lui restait : s’élancer dans le vide au moment où la corde se rapprochait et la saisir s'il pouvait. C'est ce qu'il fit. Il fut sauvé. Ainsi en est-il des réveils.
Ils s'approchent un instant et l'occasion d'en bénéficier peut ne jamais revenir pour ceux qui la laissent passer.
A l'issue d'une réunion de Réveil, ce même témoin oculaire ajoute : " Il y avait ce soir-là des multitudes, dans cette veillée où il fallait prendre une décision.
Quelques-uns voulurent rester "intacts", rentrer chez eux " non sauvés," et pour ceux-là, la chance ne se représentera peut-être jamais ".
Il y a assurément des âmes qui, en face du Réveil, disent : " Pas aujourd'hui, demain ", et pour lesquelles demain équivaudra à jamais.
Chapitre 3
Il nous faut une pentecôte
Il nous faut absolument une Pentecôte. Tout nous le crie : les haines des peuples, les guerres qui se préparent ; les populations qui ont faim, les iniquités sociales, l'inintelligence des gouvernements, les catastrophes qui se préparent, et surtout l'oubli de Dieu.
En 1857 à New-York, cette conviction - qu'il faut au monde une Pentecôte, - s'était emparée avec puissance de l'esprit et du cœur d'un homme. " Seigneur, s’écriait-il dans la détresse de son cœur, que veux-tu que je fasse ? "
Dieu répondit à ses prières en lui inspirant la pensée de créer une réunion de prière, au milieu du jour, pour les hommes d'affaires. Il l’inaugura le 23 septembre 1857.
Pendant la première demi-heure, il fut seul. A la fin de la réunion, ils étaient six.
La seconde réunion eut lieu huit jours après. Elle compta 20 assistants. La troisième fut plus nombreuse, et si encourageante qu'on résolut de les continuer tous les jours.
Quatre mois plus tard, il y avait 150 réunions semblables dans New-York et les environs.
L'une d’elles est fréquentée chaque jour par deux mille personnes et une autre par trois mille.
Partout les locaux deviennent trop petits.
Ceux qui remplissent ces vastes salles n'y viennent pas pour entendre des discours, on n'en fait pas, ils y viennent pour prier.
Un jour, dans un théâtre transformé en salle de prière, un jeune homme se lève. C'est un acteur. J'ai choisi le théâtre à 16 ans, dit-il, et Dieu m'a choisi à 20 ans.
Ailleurs, c'est un joueur de profession qui, saisi d'un profond sentiment de repentance, quitte ses compagnons de jeux, rentre chez lui et ne trouve de repos qu'après avoir acquis le pardon de ses péchés.
N'avons-nous pas besoin d'un réveil semblable pour faire sortir de leurs tombeaux nos populations protestantes et catholiques ?
Comme les Américains de 1857, prions avec foi en nous humiliant et en nous laissant remplir de l'Esprit de Jésus-Christ, et nous aurons aussi notre Pentecôte.
Chapitre 4
Comment le réveil éclata dans un village des Cornouailles
Le petit groupe habituel s'était rassemblé pour la réunion de prière du samedi soir dans un village des Cornouailles.
Le pasteur méthodiste était présent, de même que le fermier, le garçon du fermier, le forgeron, le charpentier, le propriétaire du magasin d'approvisionnements, et quelques personnes appartenant à la classe ouvrière.
Des hymnes de réveil avaient été chantés, tous avaient prié, mais une lourdeur inaccoutumée pesait sur la réunion, cela avait déprimé tout le monde.
La bénédiction prononcée, les assistants reprirent le chemin de leur demeure, le cœur oppressé, car la réunion de prière semblait avoir échoué.
Soudain l'un d'eux s’arrêta et, s'adressant au pasteur, il dit :
- Le ciel a paru aussi dur que l'airain, ce soir, j'ai de la peine à en comprendre le motif.
- C'est peut-être notre faute ! répondit le pasteur.
- Oui, ajouta un troisième, notre foi n'est pas assez forte. Le livre de Dieu ne dit-il pas :
" Mettez-moi à l'épreuve et vous verrez si je ne répands pas sur vous une bénédiction telle que vous n'y pourrez suffire ".
C'est là que nous manquons, nous ne mettons pas Dieu à l'épreuve. Si nous le faisions, je ne vois pas pourquoi nous n'aurions pas un réveil sur le champ.
- Alors dit un autre, pourquoi ne pas le faire ? Nous n'avons qu'à nous arrêter à l'atelier de notre ami, le charpentier, pour tout dire au Seigneur, pour lui demander de tenir sa promesse et de faire revivre son œuvre.
La suggestion fut bien reçue et l'atelier du charpentier fut transformé en maison de prière.
Comme ils prièrent !
Ils voulaient l'emporter sur Dieu, comme Jacob. Etant en communion avec leur Dieu, leurs cœurs commencèrent à brûler au dedans d'eux.
Peu après le pasteur se releva de ses genoux et s'adressant au premier homme qui lui faisait face :
- Croyez-vous que Dieu va raviver son œuvre ?
- Oui, fut la réponse, oui, je le crois.
Le pasteur s'adressa au suivant :
- Croyez-vous, mon frère, que le réveil approche ?
- Oui, je le crois.
Le pasteur s'adressa ainsi à tout le groupe. Posant la même question au dernier homme, il reçut la réponse suivante :
- Je voudrais bien pouvoir croire au réveil, mais ne puis pas, ma foi est faible. Seigneur, viens au secours de mon incrédulité.
Alors le pasteur reprit :
- Mon frère, sortez de l'atelier, pendant que vous serez dehors, nous prierons pour vous. Demandez que la foi vous soit donnée et quand vous croirez, rentrez.
L'homme sortit, marchant de long en large, il suppliait Dieu de lui donner la foi.
A l'intérieur le petit groupe intercédait dans le même but.
Le temps passait, une heure s'était écoulée, minuit approchait quand le douteux entra en s'écriant :
- Je crois, je crois que Dieu peut et qu'Il va vivifier son œuvre.
- Alléluia ! s'écrièrent tous les autres. Alléluia, le réveil vient !
- Chantons la bénédiction ! dit le pasteur.
Tous se levèrent et chantèrent, sans prendre garde aux copeaux et à la sciure de bois qui les entouraient : “ Loué soit Dieu, l’auteur de toute grâce. "
Ils quittèrent l'atelier et s'engagèrent dans la rue du village.
Soudain l'un d'eux dit : " Ecoutez ! " Tous prêtèrent l'oreille. On entendait un cri venant d'une maison proche. Était-ce un enfant ? Non, c’était le cri d'un pécheur que son fardeau écrasait :
- Seigneur, aie pitié de moi, misérable pécheur.
- Dieu soit loué ! s'écrièrent tous les auditeurs.
- " Avant qu'ils prient, je les exaucerai ! " cita le pasteur.
- L’heure est venue, le réveil a commencé ! se dirent l'un à l'autre tous ces amis.
C'était bien le cas, leur foi fut récompensée. Le réveil commencé dans cette chambre s'étendit dans la contrée, bien des hommes et des femmes se convertirent et les églises furent vivifiées.
Si notre foi était plus simple, ne prendrions-nous pas davantage Dieu au mot ? " Eprouvez moi, dit l'Eternel des armées et vous verrez si je n'ouvre pas les écluses des cieux." (Malachie 3). Cependant il est bien nécessaire de nous souvenir qu'il y a une condition primordiale à l’accomplissement de cette promesse, c'est " d'apporter toutes les dîmes à la maison de l'Eternel. " Quand nous le ferons, il sera aisé de croire et les torrents de la grâce passeront sur tous nos champs encore desséchés.
Chapitre 5
L'histoire d'un réveil
Le caractère de ce réveil, c'est sa grande simplicité. Point de prédication spéciale, point de prédicateurs itinérants, rien pour émouvoir les populations.
La vanité, l'ambition, la mondanité entraînaient la grande nation américaine dans l’abîme de la démoralisation, et voici que sous l'influence de l'Esprit de Dieu, les gens rentrent en eux-mêmes, le flot envahissant de la corruption recule, les consciences ressuscitent, et le niveau moral s'élève de plus en plus.
C'est tout un peuple, de New-York jusqu'aux montagnes rocheuses, de la Nouvelle-Angleterre jusqu'à la Floride, qui crie à Dieu sa repentance et sa foi.
Les réunions de prière continuent à se multiplier sur tout le territoire de la vaste république et la réalité de la présence de Dieu s'y fait sentir d'une façon extraordinaire.
Chose remarquable, cette œuvre est dirigée partout par des chrétiens qui ne sont pas pasteurs.
Ceux-ci viennent dans les réunions, ils y prient, mais ils ne jouent aucun rôle particulier. Jamais un réveil de ce caractère ne s'était vu aux Etats-Unis.
On multipliait partout les réunions de prière, non pour créer des besoins religieux et produire des réveils, mais pour répondre aux besoins profonds qui se manifestaient partout.
Et la prière persévérante, importune, pleine de foi, s'élevait chaque jour de milliers de villes et de villages comme un épais nuage d'encens jusqu’au trône de la grâce.
A la fin de l'automne 1857, plus de deux cents pasteurs et de nombreux laïques se réunirent à Pittsburgh pour s'entretenir ensemble pendant trois jours de la nécessité d'un réveil et de la possibilité de l'obtenir.
Un jour de jeûne, d'humiliation et de prière eut lieu dans toutes les églises.
Quelques mois après, une autre réunion avait lieu à Cincinnati, dans le même but. De toutes parts, dans les hôtels, dans les magasins, dans les boutiques, dans les tavernes, dans les wagons des chemins de fer, on n'entendait plus parler que du grand réveil.
La presse religieuse en était remplie et les journaux politiques en parlaient tous les jours.
Dans les grandes villes, les quartiers les plus mal famés étaient visités, des milliers d'âmes qui vivaient dans le vice étaient invitées à se convertir.
Bientôt on décida de visiter les familles riches, les avenues à la mode, et le nombre des personnes qui fréquentaient les réunions de prière s'en accrut considérablement.
Les réunions sont très variées. Le président lit les demandes de prières qui lui sont remises. Des frères se lèvent et prient en faveur de ces demandes. Un jour, un homme vénérable de Saint Louis prend la parole :
" L'œuvre de la grâce a été puissante chez nous, dit-il, surtout parmi les églises de noirs. Nous avons des congrégations " de couleur ", qui ont d’excellents pasteurs très évangéliques".
Un autre homme se lève pour raconter divers exaucements de prières. Puis il parle du devoir de prier pour ceux qui nous gouvernent.
Le président de la République, dit-il, se rendait chaque jour à la réunion de prière pendant qu'il était aux bains de Bedford.
Prions pour le président Buchanan. Quand le juste gouverne, la terre se réjouit ; quand le méchant gouverne, la terre est en deuil.
Un habitant de Philadelphie raconte, en peu de mots, les œuvres merveilleuses que la grâce accomplit dans sa ville.
Toutes les salles de prière s'y remplissent et Dieu y manifeste avec éclat la puissance de son Esprit. Une nouvelle espérance et un zèle dévorant y pénètrent tous les cœurs.
Un marchand quincaillier fait quelques remarques très juste sur la manière dont les cinquante mille chrétiens professant de cette cité devraient s'y prendre pour atteindre ce million d'âmes qui habitait la ville.
Le grand point serait, à son avis, que chaque chrétien prit sous sa surveillance un individu ou une famille, et s’efforçât de l'amener à Dieu.
Une courte prière est faite pour le succès de la proposition qui vient d'être faite ; ensuite un homme se lève et dit : " Quand une personne qui a demandé les prières de l'assemblée a été exaucée, je crois que son devoir est de le dire pour l'encouragement de tous ".
Et il raconte qu'il y a six semaines environ, il avait demandé à Dieu, dans cette même salle, de bénir ses efforts pour l’établissement d'une réunion de prière à la campagne, dans une localité où il devait passer l'hiver.
" La première semaine, dit-il nous n'étions qu'une vingtaine ; la seconde, près de trente ; la troisième, quarante, et la dernière, plus de cent.
Chaque réunion a été solennelle et pleine d’intérêt. L’émotion était grande dans l'auditoire.
A la dernière, un grand nombre versaient des larmes, et l'on voyait que l'Esprit de Dieu travaillait dans les cœurs inconvertis.
Quelqu'un exprime son inquiétude de ce que l'on envoie tant de demandes de prières. " Je crains, dit-il, que cela ne nous jette dans l'orgueil spirituel ".
Aussitôt un homme se lève : " Oh ! ne découragez pas ceux qui nous envoient ces demandes ! Où serait aujourd'hui mon fils, sans vos prières ? "
Un pasteur raconte qu'il vient d'être accosté dans la rue par un inconnu qui est préoccupé depuis quelque temps de son salut.
Il avait été à diverses réunions de prière dans l'espoir qu'on lui adresserait la parole, mais personne ne semblait faire attention à lui. " Un jour, une mère demanda les prières pour son fils. Je vis le papier après la séance. C'était bien l'écriture de ma mère. Elle au moins pensait à moi ! "
Un jeune homme, dit le président, qui avait sollicité nos prières, nous demande aujourd'hui de rendre grâce à Dieu de ce qu'il a enfin “ trouvé le Sauveur ". Un instant après, le jeune homme se lève et raconte comment ses ténèbres se sont promptement changées en lumière et sa tristesse en joie. Il invite l'assemblée à louer Dieu pour la grâce qu'il a reçue.
Un dernier témoin se lève pour raconter qu'une mère, qui avait l'habitude de prier, vient de mourir, en laissant six enfants inconvertis. Mais les prières de cette mère n'ont pas été vaines : tous les six sont successivement parvenus à la foi. Le dernier d'entre eux s'est converti il n'y a que quelques jours. " Je suis l'un de ces six, ajoute-t-il, et je suis ce dernier dont je parle ".
L'heure était terminée. Elle avait paru très courte à tous les assistants. Les minutes s'étaient envolées sur les ailes de la prière et de l'action de grâces.
Cette réunion est l'image de toutes celles de New-York et d'ailleurs pendant l'année 1858.
Chapitre 6
L'histoire du réveil américain
Voici un trait remarquable qui montre l'action puissante du Saint Esprit aux Etats-Unis pendant l'année 1858.
Dans une localité vivaient isolées environ vingt familles. Elles n'avaient aucuns rapports avec les habitants des environs.
Leur impiété, leur méchanceté, leur habitude du jeu et leurs nombreux vices étaient la terreur de leurs voisins. Il va sans dire qu'elles n'avaient aucune habitude religieuse.
Un jour, un homme qui faisait partie de ce clan vicieux se trouvait chez un de ses voisins, membre de la même société impie, et comme il proférait les jurements les plus épouvantables, la femme de la maison lui dit :
" Si vous continuez à blasphémer de la sorte, j'ai bien peur que cette maison ne s'écroule sur nos têtes".
" A vous entendre, reprit le jureur, on dirait que vous devenez pieuse, la mère ! "
" Ah répondit-elle, il serait grand temps, en effet, que quelqu'un d'entre nous devint religieux. "
" Tiens, si c'est cela, pourquoi n'aurions-nous pas aussi bien une réunion de prière dans votre maison ? "
Et plusieurs voix s'écrièrent : " Eh bien, oui, une réunion de prière ! Nous voulons une réunion de prière ! "
On convient du jour et de l'heure, et pour présider cette réunion, on choisit le seul homme de toute la communauté qui n’eût jamais fait profession de piété.
C'était un relaps de grande notoriété, mais il n'en était que mieux qualifié pour la parodie qu'on voulait jouer.
Le moment venu, ils s'assemblèrent tous. Le relaps se chargea bien de présider, mais lorsqu'il fallut prier, il resta court.
Alors on essaya de chanter ; le chant n'eut pas plus de succès que la prière.
Confus et décidés pourtant à ne pas abandonner la partie, ils se donnèrent rendez-vous pour le dimanche suivant à cinq heures de l'après-midi, et ils envoyèrent demander à un diacre qui habitait à une certaine distance, de venir présider une réunion de prière au Coin d’Enfer.
C'était le nom de la localité. Le bon diacre hésitait, sachant qu'on se moquait de lui.
- " Irai-je ? demanda-t-il à un ami.
- " Sans doute, et même je vous accompagnerai ".
A l’heure indiquée, ils se présentèrent donc ensemble au Coin d'Enfer. Les vingt familles impies étaient déjà réunies.
" Je n'étais là que depuis quelques minutes, raconte le diacre, que je sentis la présence de l'Esprit de Dieu. Pendant cette première réunion, quatre ou cinq de ces hommes endurcis et corrompus furent pénétrés d'une sérieuse conviction de leurs péchés ; d'autres se convertirent à la réunion suivante et les réunions continuèrent avec succès. A la dernière, il y avait plus de cent personnes ".
Voici un autre fait non moins réjouissant :
Un homme très riche, orgueilleux, incrédule et impie réunit un jour sa femme et ses enfants pour leur déclarer que celui d’entre eux qui deviendrait pieux ou fréquenterait les réunions de prière serait déshérité et chassé de chez lui.
Malgré cette défense, la fille aînée continua à fréquenter les réunions, y trouva la paix et rendit publiquement témoignage de sa foi.
Le père fut aussitôt averti par quelques auditeurs. Lorsque la jeune fille rentra le soir à la maison, elle le trouva sur le pas de la porte, tenant une grosse Bible dans ses mains.
" Marie, dit-il, on m'a dit que vous aviez fait ce soir une profession publique de votre religion ; est-ce vrai ? "
" Mon père, dit la jeune fille, je vous aime, mais j'aime aussi mon Sauveur ".
Il ouvrit la Bible, et montrant un feuillet non imprimé, il demanda :
" Quel est ce nom ?"
" C'est le mien. "
" Ne vous ai-je pas dit que je vous déshériterais si vous preniez de la religion ?"
" Oui, mon père. "
" Et bien, il faut que ce que j'ai dit soit fait. Vous ne rentrerez pas dans la maison. "
Et déchirant le feuillet :" Voilà ! dit-il. Je déchire de la même manière votre nom. Vous n'êtes plus du nombre de mes enfants et vous pouvez vous en aller "
Elle s'en alla donc chez une vieille dame chrétienne des environs, et n'entendit pas parler de son père pendant trois semaines.
Un matin, elle vit la voiture de la famille s’arrêter devant la maison. Elle courut demander au cocher ce qui était arrivé.
" Votre père est très malade, répondit-il, et il pense qu'il est sur le point de mourir. Il a peur que sa méchanceté ne le conduise en enfer, parce qu'il vous a déshéritée et chassée de la maison. Il désire ardemment que vous veniez de suite auprès de lui. ”
En effet, elle trouva son père très malade ; mais elle vit bientôt que le remord seul le tourmentait. Elle pria donc avec lui, essayant de lui faire comprendre le salut et de l'amener à Christ.
Trois jours après, le père, la mère et la fille se réjouissaient ensemble d'être les héritiers de Dieu et les cohéritiers de Jésus-Christ.
La déshéritée était devenue, par sa fidélité, l'instrument de l’Esprit de Dieu pour amener ses parents à la foi.
A cette époque, on aurait difficilement trouvé une personne à New-York et dans les environs qui ne fut pas préoccupée de son salut.
La plupart des gens portaient dans les profondeurs de leur âme une puissante conviction de péché, et ceux qui s'étaient moqués de la piété se sentaient attirés vers Dieu d'une façon irrésistible.
Par orgueil, un grand nombre résistaient à ce sentiment intérieur et s’efforçaient de cacher à leurs amis chrétiens l'insurmontable chagrin qui les dévorait.
C'était le cas d'un riche négociant, fils d'une mère pieuse. Des angoisses morales et spirituelles cuisantes le tourmentaient.
Cependant il ne voulait fréquenter aucun culte, tout en essayant en secret de faire sa paix avec Dieu.
Mais c'était en vain qu’il lisait sa Bible et qu'il priait ; son trouble ne faisait qu’augmenter. Il se décida alors à fréquenter les réunions de prières, en allant là où il n'était pas connu.
Il allait tomber dans le désespoir quand il comprit que son orgueil était l'obstacle à sa conversion. Il résolut donc, avec le secours de Dieu, de confesser son triste état d'âme devant ses connaissances, dans une réunion publique en racontant ses luttes et ses détresses.
Il le fit, puis s'agenouilla pour implorer avec larmes le pardon de Dieu.
Le lendemain, il pouvait se réjouir en Jésus son Sauveur.
Une femme de mauvaise vie envoya à une réunion de prière la requête suivante :
" Je sens que j'ai été une grande pécheresse, que j'ai mené une vie des plus coupables ; que j'ai besoin de Christ. Je désire devenir chrétienne, et je demande les prières de l'Eglise ".
Et voici dans la même réunion une autre requête :
" Les prières de cette assemblée sont humblement demandées pour G.B. qui a passé sa vie dans le vice, et qui songeait il y a quelques jours encore à se suicider, considérant ce crime horrible comme le seul moyen de mettre fin à son angoisse ".
Chapitre 7
Qu'est-ce que le réveil ?
La Parole de Dieu se sert de la même image, le sommeil, pour représenter l’indifférence du pécheur inconverti et la torpeur spirituelle où peut tomber le chrétien.
Le premier ignore ou voit sans horreur ses péchés, comme il ignore ou connaît sans en être ému l'amour de Jésus-Christ.
Ni les menaces ni les promesses de Dieu ne le touchent.
Sans crainte et sans espérance, insouciant à l'égard de Dieu et de son avenir éternel, absorbé dans les rêves de la vie présente qu'il prend pour des réalités ; il dort.
Le second, au contraire, a connu tout ce qu'ignore le premier ; il a éprouvé toutes les émotions que l'autre n'a point ressenties.
Mais peu à peu, sous des influences diverses dont nous parlerons, en temps et lieu, ses impressions ont perdu de leur vivacité.
Ses idées, restées les mêmes, n'ont plus eu la même action sur ses sentiments.
Il se sait pécheur, mais son péché ne lui arrache plus de larmes. Il se croit racheté, mais il ne tressaille plus de joie et de reconnaissance pour son salut.
Il appelle Jésus-Christ le Sauveur, mais son cœur ne bat plus pour lui d'une tendre affection. Ses prières sont sans effusion, son obéissance est toute extérieure et sans enthousiasme.
Les glorieuses perspectives que sa foi ouvrait sur l'avenir se sont toutes voilées pour lui. Sa vie spirituelle n'est plus qu'une végétation ; il dort.
Le pécheur inconverti peut, en prolongeant son sommeil volontaire, tomber dans une léthargie d'où rien ne saurait le tirer, rien que le tonnerre de la justice de Dieu éclatant dans l'éternité.
Heureusement il n'en est pas ainsi toujours.
Averti par une voix extérieure ou intérieure, il arrive souvent, de ce côté-ci de la mort, que le pécheur, saisi de la frayeur de Dieu ou confondu de son amour, crie grâce et cherche la voie du salut : c'est son réveil.
Le sommeil du chrétien peut-il, comme celui de l'inconverti, devenir léthargie mortelle ?
Le déclin dans la vie spirituelle peut-il aller jusqu'à la mort ?
Grâce à Dieu, d'innombrables expériences nous permettent d'affirmer que ce déclin peut s’arrêter, que ce sommeil peut prendre fin.
Il arrive qu'un jour, par des moyens bien divers, bien étranges souvent, souvent inconnus et méconnus aussi, le chrétien devenu insensible, éclairé mais d'une lumière sans chaleur, est tiré de son engourdissement.
Ce qu'il savait déjà, il lui semble l'apprendre ; ce qu'il croyait déjà, il lui semble qu'il ne fait que commencer à le croire ; de nouvelles vues, de nouvelles impressions remplissent son esprit et son cœur ; il se fait comme une conversion nouvelle qui se jette la première dans l'ombre et en fait presque nier la réalité : c'est son réveil.
Dans les cas que nous venons de rappeler, il s'agit de réveils purement individuels.
Ceux-là se produisent partout, toujours, à l'insu des hommes le plus souvent. Ils sont l'œuvre cachée, continue, de l'Esprit de Dieu dans le monde et dans l'Eglise.
Mais il arrive parfois que sous l'empire de certaines circonstances, ces changements individuels, soit de chrétiens, soit d'inconvertis, se produisent simultanément en nombre plus ou moins grand, parfois en très grand nombre et avec des caractères analogues ou semblables.
C'est à de tels mouvements qu'a été donné dans les temps modernes le nom de réveils ; c'est à l'étude de ces mouvements que les lignes qui précèdent doivent servir d'introduction.
Les réveils en général
Ce serait une erreur de croire que les réveils ont nécessairement un caractère évangélique et ne peuvent se produire que sous l’influence des enseignements chrétiens. Ils se produisent au contraire partout, chez tous les peuples où les idées de Dieu, de l'âme et de la vie à venir exercent leur empire sur la conscience humaine.
On les voit éclater tout à coup dans les églises les plus pures et dans les plus corrompues. Parmi les Juifs, parmi les mahométans, parmi les païens même, de puissants réveils religieux ont eu lieu.
Naturellement, chacun de ces réveils revêt un caractère particulier. En secouant leur indifférence, les hommes n’échappent ni aux idées, ni aux préjugés inhérents à la religion qu'ils professent.
C'est, au contraire, aux idées de celle-ci et à l'observation de ses pratiques que leur réveil les ramène, plus croyants et plus zélés.
Parfois aussi, souvent même, le réveil agit comme un dissolvant à l'égard du culte ancien. Certaines idées ou pratiques qu’on croyait ne faire qu'un avec lui apparaissent comme des choses superficielles, des choses sans valeur, ou prennent une signification nouvelle par suite du point de vue nouveau sous lequel on les voit.
On rejette comme inutiles ou dangereuses des choses regardées jusque-là comme essentielles. La fermentation du vin nouveau fait voler en éclats les vieilles outres.
Les réveils sont alors accompagnés de réformes extérieures qui deviennent la marque sensible du changement opéré dans les esprits.
Mais, quels que soient les résultats du réveil, qu'il ait pour effet le seul renouvellement intérieur des individus ou qu'il produise en même temps une transformation du culte, c'est toujours des principes antérieurement admis, qu'il tire son origine ; il est le produit de la religion professée, il éclot d'elle.
Considérez, par exemple, le grand réveil de la Pentecôte du temps des apôtres de Jésus : il plonge ses racines au plus profond du judaïsme ; c'est, de fait, un réveil purement Juif.
Toutes les pensées, tous les besoins, toutes les espérances des âmes convergent vers le Messie promis, préfiguré, attendu.
Quand les apôtres montrent à la foule des juifs, en la personne de Jésus, ce propre Messie méconnu, bafoué, crucifié par eux ou avec leur approbation, ils le reconnaissent, prennent horreur d'eux-mêmes, entendent avec joie la promesse du pardon et par millier se déclarent publiquement pour lui.
Ont-ils par-là cessé d'être Juif ?
Nullement. Ils le sont, ils veulent le demeurer et leur zèle pieux se traduit par une assiduité nouvelle aux prières du temple.
C'est plus tard, peu à peu, que s'opère leur scission d'avec le judaïsme.
Non toutefois sans que ces juifs-chrétiens protestent qu'eux seuls sont les vrais juifs conséquents et fidèles, comme ils l'étaient en effet.
Le réveil du seizième siècle, qui devint la réforme, eut sous ce rapport les mêmes caractères que le christianisme naissant.
C'est au nom du passé, au nom des vraies doctrines de leur Eglise, que Luther et ses pieux adhérents proclamèrent le salut par grâce et entraînèrent les multitudes altérées du pardon divin.
Ils se disaient, ils se croyaient, ils étaient réellement, plus que leurs adversaires, imbus des anciennes doctrines catholiques.
Ils ne virent que plus tard l’incompatibilité entre les vérités récentes " anciennes " où ils avaient trouvé la paix et les superstitions récentes qu'on voulait les contraindre d'accepter.
Les grands réveils suscités en Angleterre et en Amérique par le moyen de Wesley et de Whitefield sont nés et se sont développés par la doctrine et sous la forme reçue.
La séparation des sociétés wesleyennes des Eglises établies fut plus tard trouvée avantageuse ; elle ne fut jamais posée en principe.
Aucun des nombreux réveils de ce siècle dans les Eglises issues de la réforme, n'a commencé, ni en Europe, ni en Amérique, par la répudiation du passé religieux de ces églises.
Au contraire, c'est dans ce passé qu'on est allé chercher le principe même de la doctrine où le mouvement puisait son énergie.
Les réveils actuels ou futurs pourraient-ils différer sous ce rapport de ceux qui ont précédé ?
Pourraient-ils devoir leur origine, emprunter leur force, trouver leur raison d'être dans quelque principe ignoré jusqu'ici ou tombé dans l'oubli après avoir été connu ?