Se préparer pour Noël
(L’histoire de Noël et l’histoire du cantique : " Voici Noël, oh douce nuit ")
Il semble qu’il y a toujours du temps pour acheter des cadeaux, pour faire les décorations et pour décider qui doit être invité et ce que l’on va manger.
Hélas, si souvent il y a très peu ou même pas de temps de reste pour la vraie célébration et pour Celui au Nom duquel toute cette fête est organisée.
Même si on chante " Douce nuit…. Car l’enfant nous est né, le Fils nous est donné ! " et si l’on entend proclamer " Voici, il vous est né un Sauveur ", cette fête n’apporte rien parce que le message de Noël n’est pas pris au sérieux, parce que la vision du Sauveur n’est pas crue.
Comme une légende, comme une fantaisie religieuse, pittoresque ?
Notre cœur ne s’en émeut pas.
Une fête folklorique est incapable d’éveiller en nous la foi, d’allumer en nous la vie que Dieu veut offrir à notre monde par Jésus-Christ.
L’obscurité continuera de régner sur l’humanité, sur notre vie.
Nous n’aurons pas de réponses aux questions que provoquent en nous les nombreux soucis et craintes de ce monde.
L’homme restera perdu !
Bien sûr, le 25 décembre n’est très probablement pas la date de la naissance de notre Sauveur.
Alors, direz-vous, comment peut-on vraiment célébrer son anniversaire si nous ne connaissons pas le jour où il est né ?
La date précise n’est pas ce qui est le plus important.
Ce qui importe c’est le fait de l’incarnation.
" Lorsque les temps ont été accomplis " - que ce soit le 25 décembre, le 6 janvier, le 6 avril, ou n’importe quelle autre date – le Sauveur est né.
C’est cela qui est important pour nous.
Quiconque est prêt à considérer l’évidence ne peut pas nier la vérité que " la Parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous " (Jean, chapitre 1, verset 14).
Oui, le Fils de Dieu est vraiment venu dans ce monde à un moment précis de l’histoire humaine.
Ceci ne peut être mis en question.
Il est venu ! Il mourut ! Il est ressuscité !
La date exacte est d’importance secondaire, mais le fait qu’Il est venu sur terre signifie tout, car " le Fils de l’homme est venu pour chercher et sauver ce qui est perdu " (Luc, chapitre 19, verset 10).
C’est pourquoi il est tout à fait approprié qu’en cette saison nous fassions une pause pour louer Dieu, pour le merveilleux don de Son amour ! Remercions-le aujourd’hui qu’il nous " est né un Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur ". (Luc, chapitre 2, verset 11).
C’est exactement ce pour quoi se préparaient quelques jours avant Noël en 1818 le pasteur et l’organiste de l’Eglise du petit village de Oberndorf, en Bavière, aux environs de Salzburg.
Et voici, que l’organiste, du nom de Franz Grüber, qui était aussi l’instituteur du village, fit la veille de Noël une alarmante découverte.
Le vieil orgue, déjà depuis longtemps bien malade, ne fonctionnait plus.
Il ne pouvait s’imaginer un Noël sans orgue.
Déjà depuis plusieurs jours, le village était bloqué par la neige et il savait qu’il n’y avait personne à Oberndorf capable de le réparer.
Il se rendit immédiatement chez le pasteur, Joseph Mohr, dans l’intention de lui demander de lui remettre un cantique que l’on pourrait facilement chanter sans l’aide de la musique.
Mohr était rentré d’une visite pastorale dans un foyer où un bébé venait juste de voir le jour.
Inspiré par la scène qu’il venait de voir et la comparant avec la crèche de Bethléem, et les récits bibliques qu’il venait de relire et de méditer, profondément saisi par la signification de cette merveilleuse histoire, il avait sous l’inspiration du moment écrit un poème.
C’est ainsi que ne prêtant guère attention aux plaintes de son organiste, il lui remit les paroles qu’il venait de composer.
Francis Grüber rentra chez lui, s’assit devant son piano et se mit à improviser une mélodie sur ce texte.
Sa femme était déprimée, car elle avait eu l’immense douleur de perdre son enfant, son enfant unique.
Bien qu’accablée elle tendit une oreille attentive et éclata en sanglots.
Déchargeant son cœur à l’écoute de cette mélodie et de ces paroles, elle se confia entièrement au Sauveur qui la soulagea de sa peine.
Très vite la paix de Noël inonda leur cœur à tous deux, qui s’unirent dans des larmes pour chanter ce nouveau cantique.
Le lendemain, jour de Noël, les gens d’Oberndorf, se rassemblèrent dans la petite Eglise et aimèrent immédiatement le cantique.
Et c’est ainsi que Joseph Mohr et Franz Grüber donnèrent au monde l’un des plus beaux et le plus aimé des cantiques de Noël.
Ce n’est qu’en février que le facteur d’orgue, Karl Kauracher, termina les réparations de l’orgue et fit venir Franz Grüber pour l’essayer.
Mohr suggéra qu’il joue " Voici Noël " et cette mélodie fut connue plus loin pour apparaître dix années plus tard à Leipzig où quatre enfants, Caroline, Joseph, Andreas et Amalie Strasser, l’ont chanté sur le marché pour attirer les acheteurs de Noël au stand de gants de leurs parents.
Un passant, Pohlerz, directeur général de musique pour la Maison Royale de Saxe, invita les jeunes chanteurs à se produire devant le roi et la reine la veille de Noël 1832.
Trente ans plus tard, une traduction anglaise fut faite par J. F. Young, et plus tard ce cantique fut traduit dans d’autres langues ainsi qu’en français.
Que l’histoire de ce chant dont les auteurs ont trouvé paix, foi, espérance et consolation en Jésus-Christ et que la vraie signification de Noël nous saisissent chacun de nous tout à nouveau en cette saison. Tout comme Joseph Mohr et Francis Grüber.
Paix sur la terre
C’était la veille de Noël, mais rien ne le rappelait dans l’aspect de la grande prison près de la cathédrale.
Bien que la nuit fût presque tombée, les longues rangées de fenêtres grillées restaient sombres, et, se détachant contre le ciel d’un bleu mystérieux, le bâtiment ressemblait à l’un de ces restes des temps antiques, monstrueux amas de blocs immenses, élevés par des mains depuis longtemps retombées en poussière.
Tout au fond, du côté de la cour intérieure s’ouvre le parloir, où les détenus en préventive peuvent recevoir leurs proches.
Il était occupé ; un serviteur de Dieu s’y trouvait, luttant avec une âme de jeune fille, qui éloignée du bien, avait fini par échouer dans ce triste lieu.
Et maintenant les exhortations, les supplications ne pouvaient éveiller en elle le repentir de sa faute.
" Non, monsieur le pasteur, je n’ai pas volé, l’équivalent de ce que j’ai pris m’était dû, plus que dû ; et ma maitresse savait bien qu’il me fallait mes gages. Je suis triste de ce que j’ai fait, puisque ça me mène en prison, mais je ne m’en repens pas. "
C’était toujours ce refrain, et vaines restaient les paroles, et même la prière fervente que l’ecclésiastique prononça encore.
Que c’était déchirant de voir cette jeune fille débuter si froidement dans la carrière du cachot.
Elle n’avait pas vingt ans, elle était douce et mignonne, gracieuse et d’une tenue au-dessus de sa condition, et pourtant son cœur était adonné au péché.
Quand pour finir le pasteur lui rappela ses parents, de pieuses gens de la Forêt-Noire, elle pâlit et se retint un moment au coin de sa chaise de paille :
- Oui, si mon père me pardonnait, je pleurerais bien fort ma faute, mais il ne le voudra jamais et je saurai souffrir.
Puis, avec un regard égaré, elle ajouta :
- Je ne veux pas de pitié, pas de repentir, je voudrais mourir ; laissez-moi donc seule.
Et comme le pasteur refermait la porte elle tomba par terre et se tordit de douleur, ne voulant pas se rendre compte du remords qui commençait à labourer sa conscience.
Alors le gardien la reconduisit dans sa cellule et l’enferma pour la nuit.
C’est avec un sentiment de désolation que le bon pasteur Pouvel remontait les escaliers de sa demeure ; quand il en ouvrit la porte, ses yeux restèrent éblouis et il se boucha les oreilles.
Ses fils dansaient dans le vestibule, l’un battait de la pelle sur le chaudron de cuivre, l’autre jouait avec sa boite à musique, chantant bien fort la mélodie : ils avaient allumé toutes les bougies de la maison et ouvert tout grands les becs de gaz.
Le contraste était si grand entre cette joie, ce bonheur de vivre et la triste scène de tout à l’heure, que le père en fut saisi ; il ressortit de chez lui.
Debout hors de la ville, près de la rivière, il cria à Dieu, le suppliant de sauver cette jeune fille.
Il pria instamment, d’une de ces prières d’intercession, bénies entre toutes ; il supplia son Dieu d’intervenir, élevant ses mains et répétant bien des fois : " Sauve-la, Seigneur, sauve son âme de l’abîme et son cœur de la perdition. Seigneur, il me faut cette âme ! Peut-être n’ai-je pas été assez fidèle ; que ce péché, retombe sur moi, le berger du troupeau. "
Et dans ce moment les cloches du soir de Noël commencèrent à sonner, et leur calme mélodie plana sur la grande ville comme un gage de miséricorde.
Le fleuve coulait tranquille, peu à peu les étoiles brillèrent dans le profond firmament ; de plus en plus claire retentissait la grande voix de la cathédrale.
Pendant ce temps, le père de la prisonnière approchait.
La terrible nouvelle avait comme écrasé sa famille.
C’étaient d’honnêtes gens, comme jadis les parents du grand réformateur Luther, équitables, austères, sans reproche ; mais avec un inflexible sens de justice, bien souvent poussé jusqu’à la dureté.
Leur christianisme en était devenu effrayant pour leur benjamine, la jolie Marie.
Elle avait désiré occuper une place loin d’eux, et bien triste en était le résultat.
Cette avant-veille de Noël, le père avait embrassé sa femme au front ; elle pleurait amèrement, mais lui n’était que sombre : " Que justice soit faite, femme ; Marie a failli, qu’elle en souffre. Et que Dieu m’aide à lui pardonner son péché ; je ne le puis encore. "
Il partit.
Les trains étaient presque vides, peu de personnes aux stations, chacun, ce beau soir fêtait l’anniversaire du Sauveur ; et à chaque arbre brillant entrevu en traversant un faubourg de ville, les traits du pauvre père se raidissaient, il ne pouvait pas encore pardonner.
Les enfants du pasteur Pouvel avaient aussi leur arbre, et ils chantaient tout autour leurs beaux cantiques de Noël.
Quand la dernière bougie fut éteinte et que l’odeur de résine brûlée, le parfum de l’enfant Jésus comme ils l’appelaient, commença à disparaître, ils s’étendirent dans leur petits lits blancs et l’aîné, comme il en avait l’habitude, pria Dieu de bénir tous les pauvres prisonniers et de consoler leurs mères.
De bonne heure, le matin du 25, M. Pouvel se rendit dans la ville pour essayer d’obtenir la mise en liberté de Marie.
Et pendant qu’assis vis-à-vis de la maîtresse outragée, il lui parlait de retirer sa plainte, lui peignait la miséricorde de Dieu, la suppliant de faire grâce à son tour, le jour de la naissance du Sauveur des pécheurs.
Pendant ce temps, un homme frappait à la porte du presbytère.
La bonne le conduisit au salon, auprès de l’arbre.
Une douce chaleur y régnait, elle pénétra dans ses membres engourdis, rompus par dix-huit heures de troisièmes classes dans le train.
Tout en haut de l’arbre une banderole brillait portant ces mots : Paix sur la terre !
Quelle paix aujourd’hui ? La honte sur la famille, le tribunal, les années de prison, les ricanements des indifférents, les calomnies et la faute !
Oh ! c’était surtout la faute, qui écrasait le malheureux père ! il revoyait sa fille, son enfant blonde, et il lui semblait impossible qu’elle fût tombée, impossible aussi de le lui pardonner.
Un attouchement le surprit soudain ; il se retourna vivement.
Tout près de lui se pressait une petite tête blonde, bouclée comme celle de sa Marie, et deux yeux le contemplaient gravement.
- Es-tu le Seigneur Jésus et viens-tu rallumer l’arbre, demanda le petit enfant.
Le vieillard tressaillit.
- Le Seigneur Jésus est tout autre que moi, répondit-il lentement.
Et puis, appuyant sa vieille tête grise sur ses genoux, il fondit en larmes brûlantes.
Son cœur se brisait enfin ; il voulait maintenant oublier, pardonner ; il avait senti tout à coup ce qu’est le Seigneur Jésus dans sa grâce infinie et entrevu sa propre dureté de cœur.
Certes, il n’était pas consolé du péché de sa fille ; il allait seulement en porter le fardeau avec elle, suivant le divin exemple de son Maître.
Quand un instant plus tard, Mme Pouvel ouvrit la porte du salon, elle recula un peu effrayée.
Son petit Jean était blotti sur la poitrine du vieil allemand et ils pleuraient ensemble de tout leur cœur.
A la vue de sa mère, sa figure rayonna et il s’écria : " Maman, ce grand-papa et moi, nous pleurions parce que Jésus n’était pas là ; mais il viendra bientôt, n’est-ce pas, faire luire l’arbre comme hier au soir ? "
Mme Pouvel serra les deux mains du père affligé et, s’asseyant auprès de lui, elle aussi trouva des paroles de consolation qui réchauffèrent son pauvre cœur.
Un peu plus tard, levant les yeux, il lut de nouveau l’inscription dorée : Paix sur la terre ! et un calme sourire illumina ses traits ridés.
Ce soir-là, on ralluma l’arbre, et la fête fut encore plus belle que la veille.
Une jeune fille libérée, repentante, humiliée était aussi là, la main pressée dans une autre main durcie par le travail.
Pendant toute la soirée, ces deux mains restèrent étroitement liées et le lendemain, quand le père et la fille repartirent pour la Forêt-Noire, ils descendirent encore la rue, la main dans la main, comme deux chers enfants réconciliés !
Il neigeait très fort, bientôt le tournant de la rue les cacha, et, debout à la fenêtre ouverte, le pasteur et sa femme répétèrent le beau verset : " Gloire soit à Dieu au plus haut des cieux, paix sur la terre et bienveillance envers les hommes. "
Aline
Le Noël du jeune Boer
Pierre Van Vereren – ou Pit comme l’appelait sa mère – était un jeune Boër, habitant le Transvaal que venait de conquérir l’Angleterre.
A quatorze ans, grand, souple, fort, il guidait déjà un attelage de bœufs et montait à cheval comme un vrai dragon.
A vrai dire, il n’était pas aussi avancé en orthographe, et c’est à peine s’il pouvait lire les gros caractères de la vieille Bible de famille.
Mais Guillaume Van Vereren, son père, ne s’en tourmentait guère se disant que son petit Pit pourrait comme lui vivre en bon Boër et mourir en bon chrétien sans en savoir davantage.
Ainsi le jeune garçon en profitait-il pour ne lire que très peu et pour chevaucher le plus possible.
Le soir venu, à peine la prière du repas était-elle finie, que déjà il racontait avec volubilité sa journée : un jour il avait fait un plongeon en traversant la rivière ; un autre jour il avait été poursuivi par une vache furieuse.
Un soir, c’était à la fin de décembre, il revint tout ému :
- Père, dit-il, j’ai vu là-bas vers le mamelon, une bande de Cafres campés pour la nuit.
Le front du vieillard se rida, car Guillaume, comme les autres Boërs, n’aimait pas les nègres, et les redoutait même.
- Père, ils étaient tous tatoués et si maigres ! comme des bâtons noirs surmontés d’une grosse tête !
- Pierre, n’y avait-il pas parmi eux un vieillard de haute taille, défiguré par une grosse cicatrice et portant une barbe blanche assez longue ?
- Oui, oui, et même ça devait être le chef ; mais il ne me disait rien ; et il a fini par me tourner le dos.
Sous les épais sourcils gris du vieux Boërs, les yeux lancèrent des éclairs, et durement il répondit à Pit : c’est Matlombé le descendant des possesseurs du sol, le misérable qui, par vengeance, a tué ton frère aîné il y a dix-sept ans, et qui rôde souvent par ici.
- Père, il avait l’air si triste et si doux.
- Tais-toi ! que cet homme ne paraisse pas à portée de ma carabine…
L’enfant se tut, mais resta préoccupé jusqu’au moment où l’approche de Noël vint absorber ses pensées.
Car, là-bas, dans ce lointain Transvaal, on fête aussi la venue du Sauveur.
Oh ! Tout se faisait bien simplement chez le fermier.
Cette année-là, comme précédemment, tous les habitants de la maison se réunirent dans la grande chambre.
Le père prit la grosse Bible – précieux héritage de ses ancêtres – et relut lentement l’immortel récit de la naissance de Jésus : " Et une multitude de l’armée céleste louait Dieu et disait : Gloire à Dieu dans les lieux très hauts, paix sur la terre, bonne volonté parmi les hommes ! "
Puis on chanta un vieux psaume de Dathénus dont l’écho alla se perdre dans le désert jusqu’à la limite de ces tribus Cafres qui, dans la désolation du paganisme, ne savaient rien du bon Sauveur et de la joie de Noël.
Guillaume lut encore les derniers feuillets de la Bible où ses pères avaient écrit leurs annales, cette triste histoire de l’Inquisition catholique qui avait versé tant de sang et chassé du bon pays des Flandres, jusque dans cette lointaine Afrique, tant de familles évangéliques.
Et il termina sa lecture par la parole qu’avait prononcée un de ces aïeux, Joachim Van Vereren, au moment de monter sur le bûcher : " Mon Dieu, donne-moi la force d’aimer jusqu’à la fin. "
Après le culte ce fut le joyeux brouhaha des conversations particulières et des petits cadeaux échangés.
Puis l’on se mit à table pour le souper de Noël.
Mais une place resta vide, celle de Pierre.
On l’appela, on chercha… en vain.
On envoya les chiens-bergers à sa recherche.
La mère se rappelait la bande de Cafres : " Mon Dieu, fit-elle, pourvu qu’ils ne lui aient pas fait comme à notre pauvre Henri ! "
Précisément, voici un Cafre qui entre dans la cour, puis deux, puis trois, puis Pierre qui tire par la main le vieux chef.
Le père s’élance le poing levé ; mais son fils le devance, et, d’une voix coupée par l’émotion :
- Père, arrête, c’est moi qui l’ai amené. Il est si pauvre et les petits avaient si faim ; ils mangeaient de l’herbe.
- Assassin, tu as osé…
- Père, il ne voulait pas venir. Il me disait qu’il était un méchant, que depuis que le missionnaire blanc lui avait parlé de notre Sauveur Jésus ça lui brulait dans le cœur, qu’il méritait la mort.
- Ah oui, attends…
- Alors je lui ai dit que nous aussi nous étions chrétiens et qu’à Noël les chrétiens pardonnaient tout pour l’amour de Jésus…. Tu l’as lu tout à l’heure dans le gros livre. N’est-ce pas mon papa, tu veux pardonner comme Jésus !
Le vieux Boër ne répondit pas et rentra dans sa chambre.
On le vit par la fenêtre s’y promener de long en large.
Dans son cœur aux sentiments rudes, se livrait un ardent combat.
Tout à tour, il entendait la voix de Pierre : " Père, pardonne-lui ", et il revoyait le fils ainé, tué, raide, il y avait dix-sept ans, d’une balle.
Puis résonnait à ses oreilles le cantique des anges : " Paix sur la terre. Bonne volonté parmi les hommes… "
Mais non, c’était trop.
Et voilà qu’en marchant il arriva vers la table où la Bible était encore ouverte et il lut longtemps ces mots de son ancêtre martyr : " Mon Dieu, donne-moi la force d’aimer jusqu’à la fin. "
Brusquement il sortit, et d’une voix rauque, il dit au vieux chef : " Allons pour l’amour de Jésus, viens ! "
Ce soir-là, dans la ferme isolée de ce lointain pays des Boërs, les ennemis de la veille, les blancs, et les noirs, s’unirent dans un commun amour en Jésus.
Et si le jeune Pierre avait bien écouté, peut-être aurait-il entendu au-dessus de la ferme, dans la nuit étoilée, les anges chanter joyeux :
" Gloire à Dieu dans les lieux très hauts, Paix sur la terre. Bonne volonté parmi les hommes. "
Croire et Servir