Contre les semaines de bonté
Il n’est jamais trop tard pour bien faire, aussi je n’élève contre cet enseignement officiel de la bonté, car personne, que je sache, n’a parlé contre " les semaines de bonté. "
Les écoliers ont été invités à noter les actes méritoires accomplis au cours d’une semaine et, même, la vaste salle du Trocadéro à Paris a retenti des louanges à la bonté.
Reste à savoir si les enfants sont touchés par cet enseignement officiel de la morale, s’ils continuent à être bons.
Nous sommes de plus en plus latins et nous nous payons de mots ; la bonté ne s’enseigne pas officiellement, c’est le résultat d’une disposition spéciale du cœur et d’une contagion de l’exemple.
L’enfant qui grandit dans un bon milieu voit, autour de lui des actes de bonté ; on cultive, par l’exemple, cette vertu rare et il s’applique à être bon soit envers ses frères, ses sœurs, ses camarades, les animaux.
Mais s’il est élevé dans un milieu réfractaire à la bonté, dans un milieu égoïste, aux cœurs étroits, où l’on ne songe qu’à ses aises, où l’on ignore la souffrance d’autrui, comment sera-t-il bon au milieu de ce culte du moi et de cette sécheresse de cœur ?
Nous nous dupons quand nous nous figurons qu’un enseignement officiel de la bonté peut rendre bons et ce n’est pas en notant, au jour le jour des actes accomplis, par induction, qu’on a le droit de s’affirmer bons, et un peu de vérité peut se mêler à ces actes.
Il faut, de la part de l’enfant et de l’adulte, un élan spontané d’amour, le service joyeux et désintéressé vis-à-vis du plus humble, du plus petit, pour cela, être entouré de bonté.
Il faut arriver à réaliser cette parole de la sagesse biblique que j’aime tant à citer : " Ce qui fait le charme de l’homme, c’est sa bonté. "
Que de fois les enfants comprennent, même les plus petits, la bonté exercée en leur faveur et comme ils se plient naturellement à l’entraide dans la famille, envers les petits qui souffrent.
En sorte que les actes charitables de l’enfant, des défauts aussi, sont le reflet de son entourage ; il faut dès lors, réagir non seulement par les brochures, les conférences, mais surtout par une éducation nouvelle dans un cadre paisible ; tout est là.
C’est dans la famille, c’est à l’école qu’il faut demander l’enseignement de la bonté, dans la famille plus qu’ailleurs, et c’est du cœur maternel et paternel que se répandront les semences de bonté qui se substitueront, peu à peu, à l’égoïsme inné de l’enfant, le reste n’est qu’un leurre.
Abel VAUTRIN
Fleurette blanche
Cette fleurette était une enfant de huit ans ; son frère en avait quatre ; ils ne se quittaient jamais.
Aussi les voisines, appelaient-elles Marie : la petite maman, et Pierrot : son gros bébé.
Marie était maigrichonne et plutôt laide, mais ses yeux d’un roux noisette, étaient tout pleins de tendresse naïve, et elle avait une gaucherie délicieuse et touchante à protéger, soigner, gâter son Pierrot joufflu.
Son seul regret était de ne plus pouvoir le porter facilement, depuis qu’il était devenu si lourd.
D’où venait à Marie ce rôle de jeune mère ?
Hélas ! la véritable était morte, voilà plus d’un an, et la fillette, depuis lors, veillait à tout… comme pouvait le faire une pauvre petite maman de huit ans.
Quel pauvre soutien n’eût-il pas fallu à la pauvrette !
Son père ne lui offrait que des bourrades.
Il aimait bien ses petits, cependant, le rude forgeron, - mais, - quoi, dans sa classe de misère, sait-on caresser seulement ?
Et un malheureux homme qui, - après avoir tout le jour frappé le fer, - ne trouve pas un sourire de femme pour le détendre et l’éclairer, aurait-il les mains assez douces pour toucher à une âme d’enfant ?
Max Aubert, sa journée finie, trouvait très naturel d’avaler en maugréant, la soupe, - bien mauvaise, à la vérité – que lui avait tripotée sa petite Marie, et puis de " filer ", au plus vite, chez le père Lapointe, l’aubergiste et marchand de vin de son quartier.
Là, il trouvait, au moins, des camarades et des journaux.
Le " rouge, sang de bœuf, " surtout, le ravissait, parce qu’il disait leur fait aux capitalistes, aux patrons, aux cafards, aux curés, aux pasteurs, aux religieuses, aux bourgeois, aux fripons, enfin, à tous les défenseurs et amis ou prétendus amis de Dieu.
Max Aubert était, du reste, persuadé que ce dernier n’existait pas, mais, par une logique spéciale, il ne l’en rendait pas moins responsable de toutes les calamités privées et publiques.
Alors, c’étaient des imprécations, des discours sans fin devant les camarades émerveillés, et le forgeron se sentait grandi de tout l’abaissement qu’il proclamait au ciel et sur terre.
Seulement, à tant parler on a soif, et, vous savez, quand on a soif, on boit.
Max ne quittait le cabaret que lorsqu’il n’avait plus un seul auditeur ; il se trainait jusque chez lui en trébuchant, et tombait sur son lit comme un bœuf assommé.
Le lendemain, s’étant éveillé plus tard qu’il n’aurait fallu, il partait en courant pour l’atelier, après avoir terrorisé de sa grosse voix les deux pauvres petits, Marie, surtout, qu’il traitait avec sévérité, comme si elle eût vingt ans.
Un dimanche après-midi, les deux enfants déambulaient par les rues, l’un trainant l’autre.
Max Aubert, attablé chez le père Lapointe, ne devait pas reparaitre avant le soir ; de cela, Marie était bien certaine.
Alors, pour échapper à la tristesse du petit logis sordide que la pauvre enfant était impuissante à transformer, elle avait pris son frère par la main ;
- Viens, allons-nous promener.
- Pierrot veut, avait répondu le marmot, c’est blanc dehors, et ici tout noir.
Et voilà les deux petits en route, se tenant par la main.
Ils étaient pitoyablement vêtus, mais Marie avait lavé la figure et les mains de son poupon pour la circonstance.
Quant à elle-même, la mignonne n’y avait pas songé.
- Où nous allons ? dit Pierrot.
- Je ne sais pas, fait naïvement sa sœur, nous allons nous promener, voilà.
Mais leur bon ange les prit sans doute en pitié, et en même temps par la main.
Passant devant une chapelle :
- On chante, dit le petit, c’est joli ; Pierrot veut entrer.
Et Marie, docile, entra.
C’était une chapelle évangélique, et on y faisait, justement, l’instruction des petits : l’école du dimanche.
Une jeune monitrice, remarquant les deux nouveaux venus, tout ahuris et décontenancés, les mit à côté d’elle.
… Et pour la première fois de sa vie, la petite Marie, fille de l’anarchiste Aubert, entendit l’histoire de Jésus.
Quelle surprise ! Quel éblouissement !
Le récit avait été fait d’une manière très simple, par un vieux pasteur qui savait parler aux enfants.
Pierrot, malgré tout, était trop jeune pour comprendre, mais sa sœur était transportée.
Ses grands yeux roux, sa seule beauté, en flambaient d’extase naïve.
Dans la rue, elle entraine Pierrot en courant.
Pourquoi courir ? Elle n’en savait rien, mais c’était si beau ce qu’elle venait d’entendre, que, de joie, elle ne pouvait tenir en place, et sans son gros marmot pendu à sa jupe, eût sauté de bonheur.
Comme en rêve, elle prépara le maigre souper, mit sur la table les trois assiettes.
Elle répondait par à peu près au babillage de Pierrot.
Tout à coup résonne un pas lourd et connu ; le père est là.
Marie court à sa rencontre.
Elle oublie qu’il est probablement ivre, et redoutable en cet état ; elle oublie sa rudesse habituelle, son indifférence, elle oublie tout, hors l’étonnante nouvelle.
Il faut qu’elle dise, il faut qu’elle crie le grand bonheur inattendu qui lui remplit d’âme, qui lui semble déborder, comme un fleuve de lumière et d’azur, sur toutes choses et sur chacun.
- Papa, papa ! Nous ne serons plus malheureux ! Jésus est venu ; les anges l’ont dit ; les mages…
- De quoi ! De quoi ! coupe l’homme bourru, le regard subitement mauvais, des grimaces de religion, à présent ! Qui t’a conté ces balivernes ? Je te défends d’aller chez les curés, d’abord !
- Je n’y suis pas allée, répond Marie, toute pâle à cet accueil, mais le monsieur qui a raconté l’histoire la sait bien, et c’est la vérité…
- Le ministre !
L’alcoolique s’exalte ; son ivresse furieuse, d’un coup, lui monte à la tête. Il voit vert, bleu, rouge, il est fou…
- …. Le ministre, bégaie-t-il, le ministre ! Il n’en a pas le droit ; c’est pas lui notre curé, puisqu’on est catholique quoi qu’il n’y ait plus de Bon Dieu, depuis…, depuis…la Révolution…. N’y a plus…. Pas le droit…. Tout chambarder…
L’anarchiste brandissait ses deux points énormes comme deux massues ; il était effrayant à voir.
- Qui a dit qu’il y en avait un ? Qui l’a dit, que je l’écrase !
Alors la petite Marie perdit la tête ; elle crut que son père allait les tuer tous les deux, mais toute sa frayeur était pour Pierrot.
Aussi blanche qu’un cierge, elle le saisit dans ses bras et, terrifiée, tragique, d’une course éperdue, s’enfuit…
Max était tombé sur le sol comme foudroyé ; il était ivre-mort.
Dans la nuit claire et douce, la petite Marie fuyait…
Elle ne poussait pas un cri, ne pleurait même pas ; tout son âme était concentrée dans une pensée, dans un effort unique : sauver son frère.
C’était pour lui qu’elle avait eu l’horrible peur, pour lui qu’elle tremblait encore.
Aussi, de quelle étreinte les bras maigrelets n’enserraient-ils pas le bébé frais et rond suspendu à son cou !
C’était, chez cette gamine de huit ans, l’enveloppement maternel dans son ardeur passionnée, dans son dévouement infini.
Et Pierrot le sentait, probablement, car, bientôt rassuré, tranquille, il s’endormit sur le pauvre jeune cœur qu’il écrasait de son poids.
… Marie défaille presque ; sous la charge trop lourde, elle a des palpitations désordonnées.
Et il lui semble que quelque chose se déchire dans sa poitrine en lui faisant un mal affreux…
Lâcher Pierrot ? Se sauver toute seule ?
Allons donc ! elle n’y songe même pas.
Se raidir contre la douleur, oui, murmurer en son âme d’ange et d’enfant à la fois, sa naïve prière ;
- " Jésus ! Je sais bien, moi, que tu es là, et que tu m’aimes ! Sauve Pierrot ; conduis-moi vers toi. "
Et, réconfortée, - pendant que son cœur bondit comme pour s’élancer hors de sa poitrine, - en un suprême effort, elle presse le pas.
Où voulait-elle aller ? Pauvre innocente, l’endroit précis, elle ne le savait pas, mais elle courait vers Jésus, et, de cela elle était très sûre.
En pleine campagne, maintenant, - le faubourg qu’elle vient de quitter n’en est pas loin, - elle va, le visage livide et inondée d’une sueur qu’elle ne sent même pas couler, la démarche automatique et raide comme une somnambule.
Elle serre, de toutes ses forces fléchissantes, l’enfant qui échappe presque à ses bras suppliciés…
… La nature est paisible dans une nuit bleue de juin.
On entend l’humble note flûtée d’un crapaud.
Une fraiche haleine, toute chargée du pénétrant parfum des foins coupés, fait frissonner les feuillages en un caressant murmure ; une ondulation de cristal s’élève, pure et tendre, c’est le rossignol, veillant sur son nid…
A ce moment, Marie croit voir une grande forme humaine dans les arbres.
Elle la fixe de ses pauvres beaux yeux roux, hagards maintenant comme ceux d’une bête traquée… et, soudain, se rassure et s’illumine malgré son atroce souffrance : elle vient de reconnaitre un grand crucifix de carrefour.
- " Jésus ! pensa-t-elle, car un seul mot lui eût été impossible à articuler, Jésus ! Jésus ! "
Et, avec ce nom où passait toute son âme, toute sa confiance, tout le soulagement infini de sa détresse, elle se laissa tomber avec l’enfant au pied de la croix.
C’est que, du fond de son enfance, une toute première éducation catholique revenait maintenant à elle, et lui montrait dans ce symbole, le vrai Christ du ciel, celui du pasteur à l’école du dimanche, celui de sa mère autrefois, le Jésus, très doux des pauvres et des petits enfants.
Et tu as bien raison, petite Marie, Il est le même toujours, de quelque lieu qu’on l’implore et quels que soient les mots employés.
La tête appuyée sur la croix, l’enfant se sentait en sûreté parfaite, le grand, le fort, le tendre, était Celui qui la gardait ; elle était infiniment heureuse.
Son Pierrot, éveillé au moment de leur chute, s’était vite rendormi de son bon sommeil de petit enfant.
Il était tranquillement couché par terre, la tête seulement appuyée sur les genoux de sa sœur.
Et, Marie, à présent, sentait s’apaiser peu à peu la cruelle souffrance.
L’oiseau enfermé dans sa poitrine ne faisait plus de bons si furieux ; il semblait renoncer enfin à vouloir sortir de sa cage. La pauvre petite ne savait pas ce que signifiait ce calme suprême.
Un sommeil irrésistible l’envahissait.
Maintenant, Jésus était descendu de la croix ; Il était là, tout près d’elle ; Il posait sur son front une main si douce, que l’enfant crut sentir celle de sa mère.
- Petite Marie, veux-tu venir avec moi, là-haut ?
- Oui, oui, bon Jésus, je veux aller partout avec toi, partout !
Et, très doucement, sans secousses douloureuses, le pauvre petit cœur qui avait battu trop vite s’arrêta.
Au frais matin, rose et pur, alors que les oiseaux s’éveillent avec des pépiements encore indécis, un homme, tête nue, les vêtements souillés et en désordre, le regard affolé d’inquiétude arrive en courant au carrefour.
Ses yeux qui cherchent rencontrent les enfants, groupe touchant, gracieux, pitoyable…
Avec un cri de joie, il se précipite vers eux, les enveloppe ensemble de ses bras.
- Mes petits ! … Mes petiots… pleurait-il presque.
Mais, tout à coup, le voilà qui devient couleur de terre, avec une folie de désespoir sur son masque rude.
Tandis que le gros Pierrot s’éveillait en pleurnichant, un peu effrayé, le visage de Marie s’était renversé, inerte, blanc comme une rose blanche, ses doux yeux de noisette, déjà vitreux, tournés fixement vers le ciel.
Alors, Max Aubert, l’ouvrier dévoyé, l’alcoolique, le révolté, l’athée, fut vaincu.
Il tendit les bras vers le Christ du pardon, il balbutia en agonie ;
- Jésus ! Je l’ai tuée…, aie pitié de moi ! …
Et il s’évanouit.
La tombe de Marie fut couverte de roses blanches que son père cultivait avec un soin infini.
Le dimanche après le service, car il ne manquait jamais de se rendre à la chapelle où sa fille avait prié, il amenait Pierrot au cimetière.
- Souviens-toi toujours de ta sœur, lui disait-il, quant à moi…
Mais il ne pouvait continuer et pleurait en silence, tandis que l’enfant restait muet et intimidé devant le mystère de la douleur et de la mort.
Puis, ils s’en allaient tous deux, la petite main de Pierrot dans la grande main, devenue très douce, du forgeron. Mais, auparavant, Max avait cueilli une des fleurs de la tombe.
Il la mettait sur sa poitrine, cachée contre son cœur, pour être sa force pendant la semaine.
Elle lui rappelait la petite rose blanche que, dans un moment de folie, un père avait jetée au pied de la croix.
ELIAM
La fête d'Alsa
" Chère petite Alsa, - avait écrit grand-maman – écris-moi un mot pour me dire ce que tu désirerais recevoir pour cadeau d’anniversaire. "
Alsa réfléchit et réfléchit, car c’était là une chose importante et elle ne voulait pas décider à la légère.
Pendant quelques instants, sa plume resta posée sur le papier puis vivement elle y traça ces lignes :
" Chère grand-maman, je crois qu’un petit collier en or me ferait plus de plaisir que n’importe quoi d’autre, mais je sais que ça coute cher ! j’en ai autant envie, je crois, que maman a envie de nouvelles petites cuillères. "
Grand-maman sourit en lisant cette lettre.
Elle envoya cinquante francs à Alsa en lui disant d’acheter elle-même le collier ou tout autre chose.
" Car je sais – ajouta-elle – que souvent les petites filles changent d’idée. "
" Je ne vais pas changer d’idée quand j’ai cinquante francs pour m’acheter un collier, " dit Alsa, et elle courut chez le bijoutier.
Pendant qu’elle attendait d’être servie, elle vit sur le comptoir devant elle une boite où étaient rangées de charmantes petites cuillères, et elle se dit : " Comme cela ferait plaisir à maman ! "
- Ce n’est que cinquante francs, dit le commis, et je vous assure qu’elles les valent bien. Voyez comme elles sont jolies – prenant une cuillère de l’écrin.
- Je voudrais voir le petit collier d’or qui est en vitrine, dit Alsa timidement.
Sa main tenait le collier, mais ses yeux bleus étaient de nouveau fixés sur les cuillères d’argent.
- Je crois, dit-elle très bas, qu’après tout je vais prendre les cuillères.
Ce fut une heureuse petite fille qui courut à la maison, portant les cuillères, une heureuse petite fille qui tendit la boîte à sa mère étonnée, une heureuse petite fille qui écrivit :
Chère grand-maman, - je suis sûre que cela ne te fera rien si j’ai dépensé les cinquante francs à acheter de jolies petites cuillères pour maman et nous tous, au lieu d’acheter le collier d’or pour moi toute seule.
Je t’envoie mille remerciements de la part de tout le monde et un spécial baiser d’anniversaire de ta petite fille qui t’aime.
Alsa. "
Grand-maman sourit encore et partagea la joie des autres.
Variétés enfantines
Il y a six choses qu’un garçon devrait savoir :
1er – Qu’une voix posée, la vraie courtoisie et la bonté sont des caractéristiques aussi essentielles du gentilhomme, que de la dame.
2ème – Que la grossièreté, la brusquerie, la folle audace, ne sont pas de la virilité. Les hommes les plus fermes et les plus courageux, sont presque toujours les plus doux.
3ème – Que la force musculaire ne constitue pas la santé.
4ème – Qu’un cerveau bourré de faits n’est pas nécessairement plein de sagesse.
5ème – Que le travail impossible à un garçon de 14 ans, deviendra facile à un homme de vingt.
6ème – Que le meilleur capital pour un garçon n’est pas l’argent, mais l’amour du travail, les goûts simples, un cœur loyal envers ses amis et son Dieu.
Un bébé qui vaut 530 millions de francs
Le petit Vincent Walsh Mac Lean est l’enfant le plus riche au monde, étant l’héritier d’environ cent millions de dollars (500.000.000 de francs).
Ses parents ont si peur qu’on ne le leur vole que sa voiture est en quelque sorte une cage de fer, et que des sentinelles montent la garde devant sa " nursery " nuit et jour.
Inutile d’ajouter que cet infortuné richard est Américain.
Son père dit-on, vient de faire installer une espèce d’immense volière sur le toit de sa maison de New-York, pour y mettre des oiseaux, des lapins, des écureuils et autres animaux afin d’amuser le petit Vincent.
Les joujoux ordinaires ne suffisent pas !
En est-il plus heureux ? voici ce que nous affirme la Bible : " Le sommeil du travailleur est doux, qu’il ait peu ou beaucoup à manger ; mais le rassasiement du riche ne le lasse pas dormir " (Ecclésiaste, chapitre 5, verset 12).
Comment se fait-il, dit la maîtresse d’école à un petit nouveau que ton nom de famille soit différent de celui de ta mère ?
- C’est que, voyez-vous, maman s’est remariée – et moi pas !
Une petite fille dans un train disait sa prière avant de s’étendre pour la nuit sur la banquette du wagon.
" Mais, dit-elle, s’interrompant tout à coup, est-ce que Dieu peut m’entendre ? le train fait tant de bruit ! "
- Dis-moi qui t’a créé ? demanda un instituteur à un tout jeune élève.
- C’est le bon Dieu, fut la réponse, mais " pas plus grand que cela, " ajouta-t-il, en montrant la longueur de son bras.
Exemple frappant de la propre justice, qui tient à s’attribuer des mérites, au lieu de donner toute gloire à Dieu.
C. P.
Jyp
Jyp était un petit garçon qui allait régulièrement à l’école du dimanche et tenait à ne pas arriver en retard.
Il continuait un jour à demander à sa mère s’il n’était pas temps de partir, et elle continuait à lui répéter :
- Pas encore, mon chéri.
Enfin, elle dit :
- Je crois vraiment que tu peux te mettre en route maintenant. Ta monitrice sera dans doute arrivée.
La monitrice, Melle Adeline, avait bien recommandé à tous les garçons de sa classe de prendre l’habitude d’arriver ponctuellement à l’école du dimanche.
Tout comme ils sont tenus de le faire en semaine, sous menace de punitions, l’école du dimanche a droit aux mêmes égards que l’école communale.
C’était pourquoi Jyp se dépêchait ; mais en atteignant la maison où demeurerait les Bois, il vit à la barrière la petite Priscille qui pleurait.
- Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Jyp, ralentissant un moment sa marche.
- Je ne puis aller à l’école du dimanche ! gémit Priscille, Jack est malade et ne peut pas m’y conduire.
Jyp en fut fâché pour elle. Il savait combien il tenait à y aller lui-même, et quel crève-cœur c’était pour lui de manquer la leçon.
Priscille eut une idée subite.
Elle essuya ses larmes pour bien voir ce que Jyp en penserait.
- Maman me laisserait aller avec toi… dit-elle, hésitante.
- Oh ! Il faut que je me dépêche ! dit Jyp, reprenant sa course ; je ne puis m’arrêter pour t’attendre.
- Je ne serai pas longtemps, plaida Priscille, je suis presque prête…
Mais le petit garçon continuait à filer comme s’il ne l’entendait pas, comme s’il ne savait pas que les larmes revenaient aux yeux de la fillette, plus abondantes et désolées.
Mais il était mal à l’aise, mécontent de lui-même.
- Ce n’est pas gentil de ne pas attendre, se dit-il. Peut-être qu’il vaudrait mieux être un peu en retard que pour Priscille de ne pas y aller du tout…
Oui, je crois que Melle Adeline aimerait mieux cela … Oh ! mais elle ne saura pas pourquoi j’arrive en retard, et me regardera d’un air de reproche… elle nous a tellement dit d’être ponctuels…
Un oiseau perché sur une branche, qui avait l’air d’attendre Jyp, s’envola à son approche.
Jyp le suivit du regard et remarqua alors combien le ciel était clair et bleu.
- En tout cas, fit-il en s’arrêtant, Dieu aimerait mieux cela ! et maman aussi, et… (se retournant brusquement) moi aussi !
Il cria à Priscille :
- Va vite te préparer, dépêche-toi ! Je vais t’emmener.
Elle entra chez elle. Sans doute qu’elle se dépêcha, mais que le temps sembla long à Jyp avant qu’elle reparût !
Il allait lui crier qu’il croyait qu’elle ne viendrait jamais.
- Non, se dit-il, il ne faut pas lui dire ça, ce ne serait pas poli, et cela lui ferait de la peine. Tant pis, je n’y puis rien, à présent, si je suis en retard.
Il serra ses lèvres pour ne pas parler, et marcha vite sans rien dire.
Mais Priscille parla, elle parla jusqu’à ce qu’elle fût hors d’haleine par la rapidité de leur course et qu’elle trouvât plus commode de se taire.
- Tu es un gentil garçon, Jyp ! disait-elle. Maman trouve que tu es très gentil ; elle pense que c’est probablement à l’école du dimanche que tu as appris cela, parce que l’on y enseigne à devenir bon de toutes les façons. Elle voudrait que je sois bien attentive et apprenne aussi à devenir gentille et bonne et à penser aux autres…
Un sourire passa sur les lèvres de Jyp qui perdirent leur rigidité.
Il était content d’avoir attendu Priscille, et il avait maintenant la certitude que Melle Adeline trouverait qu’il a bien fait.
Mais le plus drôle de l’affaire, et son côté délicieux, c’est qu’en arrivant à l’école du dimanche, Jyp et Priscille n’étaient pas en retard du tout ! …